Westworld saison 1 – la critique (sans spoiler)

Notre avis : Probablement le plus gros événement sériel de l’année (ou en tant cas on a voulu nous le faire croire), successeur pour HBO de Game of Thrones économiquement parlant (elle coûte énormément d’argent, et doit en rapporter encore plus), Westworld ne démarre pas de la meilleure des manières avec cette première saison. Comme si la machine avait calé avant même de passer la seconde, le blockbuster stagne dans une problématique sensation de déployer son introduction sur presque 11 heures de programme. Vite ennuyante par cette dimension statique, la série reflète finalement bien l’esprit de l’un de ses créateurs et scénaristes, Jonathan Nolan, co-scénariste de toujours de son frère Christopher. Du concept riche en thématiques et complexe s’extrait par conséquent un contenu riche en thématiques et complexe. Bourré jusqu’au débordement d’éléments narratifs liés au développement et à la plausibilité d’un monde parallèle contrôlé par une immense entreprise, Westworld, à s’acharner de la sorte pour conférer un caractère scientifique, en oublie ses nombreuses trames, par ailleurs inégales.

Copyright : HBO

HBO dans l’ADN, voire Game of Thrones, la série navigue entre tout un tas d’intrigues et de personnages afin de cartographier au mieux l’Ouest américain d’un côté, et l’envers de ce décor de l’autre. Ainsi construits, les épisodes passent de scènes clés à scènes clés, amorçant lentement le déraillement progressif d’un univers trop bien huilé, parce que dirigé par des humains trop différents entre eux (et surtout avides d’argent et de pouvoir). Sans être surprenant, mais en tout cas pertinent, Westworld propose par son opposition entre les Hommes et les hôtes un constat sur la déshumanisation des premiers et l’humanisation des deuxièmes, qui, s’ils sont inventés de toutes pièces, semblent être les seuls à présenter un passé et ses réminiscences, symboles de cette inversion. Peu étonnant dès lors de se sentir plus concerné par les intrigues des hôtes que par les magouilles des administrateurs et gérants de ce parc d’attractions, si l’on excepte Bernard (un cas particulier néanmoins) et Ford, énigmatique de bout en bout avec son fameux scénario en construction, qui ne nous sera que pleinement dévoilé lors du final. Problème ? Ce scénario, on nous en parle dès le premier épisode, en nous promettant sa rapide finalisation. Et toute la saison 1 de Westworld tourne finalement autour de cet élément, en témoigne le final dégueulant d’explications orales (la solution de facilité) afin de boucler correctement cette partie et d’en entamer une autre, dont on se demande vraiment qu’elle pourra en être la teneur.

Copyright : HBO

Ces 10 épisodes laissent un sentiment autant mitigé que paradoxal, celui d’avoir suivi un récit rempli d’idées, issues d’une volonté de ne pas prendre, et le concept à la légère, et le spectateur pour un débile, tout en donnant l’impression de ne pas vraiment avoir assister à grand chose, alors que l’on voit dans la conclusion une fin définitive ne nécessitant pas forcément une suite devant un ensemble complet (ça c’est de la contradiction...). Sûrement est-ce à imputer à une mise en scène dont l’on se réserve toujours le choix de la qualifier d’involontairement sans saveur, ou bien de volontairement froide, mais définitivement nuisible au rythme ainsi qu’aux personnages. Les moyens sont là, les décors, les costumes, les maquillages contribuent à nous imprégner de deux ambiances antagonistes quand la réalisation multiplie les plans techniquement impressionnants mais engendrant de la distance entre le spectateur et les personnages. On se fout de leur devenir (pour une grande partie d’entre eux), alors que Westworld prétend clairement tabler sur l’émotionnel dans sa réussite. Une vision, voilà ce qu’il manque à ce blockbuster d’une grande densité, intéressant par ce que les épisodes soulèvent, mais globalement fade.

Copyright : HBO