Le 10 septembre 2025
Arthur Koestler écrit ce roman en 1939. Il y aborde la guerre des esclaves menée par Spartacus. L’auteur mélange histoire antique et fiction, pour traiter non du combat d’un homme contre le système, mais des rouages de la révolution. Le livre est présenté dans une nouvelle traduction d’Olivier Mannoni. Cette histoire dense nous entraîne dans son intrigue qui dénonce également la société des années 1930.
- Auteur : Arthur Koestler
- Editeur : Calmann-Lévy
- Genre : Roman
- Nationalité : Française
- Traducteur : Olivier Mannoni
- Date de sortie : 3 septembre 2025
- Plus d'informations : Le site de l’éditeur
L'a lu
Veut le lire
Résumé : « Spartacus » débute dans la Rome antique du premier siècle avant Jésus-Christ. Le greffier Quintus Apronius se lève aux aurores. Il parcourt la ville pour prendre son office au tribunal du marché. À midi, il déjeune rapidement et se rend aux thermes. Dans la salle des dauphins — les toilettes des bains —, il rencontre Lentulus Batiatus, dirigeant d’une école de gladiateurs. Soixante-dix des hommes de Lentulus se sont enfuis, avec notamment ses deux meilleurs combattants, un Gaulois nommé Crixus et un parthe vêtu d’une peau de bête, Spartacus...
Critique : Arthur Koestler raconte l’histoire de Spartacus sous l’angle de la révolution, de ce qui fait qu’elle réussit ou échoue. Pour cela, il adopte de nombreux points de vue : celui du célèbre gladiateur, mais aussi ceux d’un orateur Romain, Zozimos, d’un avocat de Capoue, Fulvius, d’un sage essénien, d’un berger de Lucanie, du greffier Quintus Apronius, du banquier ambitieux Marcus Crassus et d’autres personnages... Chacun d’eux, à un moment, devient un rouage de la révolte ou de l’opposition à cette dernière, chacun aperçoit une partie du bloc. À travers leur regard, Arthur Koestler évoque "la loi du détour", cette idée que pour réussir à renverser le régime totalitaire, la révolution doit passer par des actes de dictature.
Arthur Koestler, communiste puis fervent opposant au stalinisme, montre que la révolution ne peut se faire sans sacrifice. Il pointe une violence inéluctable.
Pour le lecteur d’aujourd’hui, il est difficile de conclure si le roman approuve ou dénonce cette "loi du détour". Spartacus n’a pas accepté de faire les sacrifices humains nécessaires, son combat échouera. Mais d’un autre côté, Spartacus se perd aussi lui-même, s’interrogeant sur sa légitimité, sur la nécessité de la violence.
Face à lui, Marcus Crassus, le banquier devenu meneur d’armées pour défendre Rome, a, lui, très bien compris les lois de l’économie et donc de la politique romaine et il s’en sert astucieusement. Paradoxalement, sa triste fin montre que comprendre le système, le maîtriser, ne met pas à l’abri de l’échec. Pour lui, comme pour Spartacus, tout se joue sur une décision, une erreur selon le point de vue, aux conséquences fatales.
Lire Spartacus, c’est aussi apercevoir une société romaine au bord du gouffre. Arthur Koestler démonte de manière claire les rouages du fonctionnement de la capitale du monde antique, les rivalités et les enjeux des hommes de pouvoir. Par là, il dénonce ce communisme montant des années 1940 et 50, ayant mis en pratique cette fameuse "loi du détour" et qui, malgré les sacrifices de trop nombreuses vies à l’idéologie, échouera aussi à imposer un État idéal, ce que souhaite mettre en place Spartacus avec sa Cité du Soleil.
Mais lire cette histoire dense et passionnante, c’est aussi prendre conscience de la situation de notre société. Certes, il n’y a plus d’esclaves officiels, plus de pays conquis, mais la mondialisation et les choix politiques semblent apporter les mêmes effets que la conquête romaine : main-d’œuvre étrangère bon marché, exploitation des produits de pays lointain à bas prix cassant le marché local, investisseurs ambitieux et sans scrupules, qui prennent le marché et s’enrichissent au détriment des personnes qui n’ont pas les moyens, sans oublier les politiciens corrompus et arrivistes... Ces problèmes s’accumulent jusqu’au moment où les individus relèvent la tête, mais seuls quelques-uns se rebellent. Arthur Koestler s’intéresse aussi à cet étrange phénomène, ce revirement des masses qui se laissent convaincre par l’État et préfèrent défendre le système qui les opprime plutôt que de risquer le chaos de la liberté. Est-ce la peur de l’inconnu, la crainte du poids imposé par la responsabilité de leur choix d’hommes libres qui les poussent à ce paradoxe ? Est-ce plus facile de suivre le système et de s’en plaindre que de le renverser et de porter le fardeau du monde ?
Cette approche intéressante fait partie intégrante du roman. En effet, si l’on suit une fiction avec de multiples personnages, le livre est ponctué de fines analyses politiques, économiques, placées dans les dialogues et les réflexions des personnages. Tout cela nous maintient dans l’histoire, car ces éléments constituent les causes profondes de l’intrigue.
À la fin, une postface de Henry MacAdam revient sur la genèse du livre, ses influences littéraires, les conditions de sa traduction américaine et les retombées critiques. C’est l’occasion de mieux comprendre l’histoire de ce recueil.
Spartacus est un livre qui vous garde de bout en bout. Il mêle l’histoire d’une révolte, des réflexions politiques et la mise en scène de personnages attachants, dépassés par un mouvement qui les emporte, alors qu’ils rêvaient simplement d’une vie libre au grand air.
600 pages – 24,90 €
La chronique vous a plu ? Achetez l'œuvre chez nos partenaires !
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.


























