Voyage au bout de l’en frère
Le 2 février 2005
Comment affronter un frère trop célèbre ? Un premier roman profondément honnête et touchant


- Auteur : Alexandre Moix
- Editeur : Edition Carnot

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Quand un jeune homme voué à l’ombre et aux espoirs déçus décide d’affronter la relation qui le lie à son frère trop célèbre, cela donne un premier roman profondément honnête et touchant. A coup de petites phrases pesées au gramme près, Alexandre Moix revient sur son chemin d’éternel second dans une société qui n’a d’yeux que pour ce qui brille. Et l’on se prend à lui souffler de s’affranchir enfin, parce qu’il le vaut bien !
Alexandre est le trentenaire type : enfant de soixante-huitards depuis longtemps rentrés dans les rangs, talonné dès l’école par deux obsessions et leurs avatars : l’échec et la gloire, le chômage et les feux de la rampe, la bière tiède et le champagne. Alors que son frère Grégory semble définitivement passé sous le faisceau des projecteurs, Alex, lui, peine à sortir de l’ombre.
Il faut dire qu’il la traque l’ombre rassurante, où qu’elle se trouve : celle que projettent des monstres sacrés tels que Truffaut ou Dewaere, que ce jeune homme tout d’élégance et d’écorchures ne peut que vénérer, celle que laissent les femmes qui l’ont quitté et dont il cultive le souvenir jusqu’à la folie, celle du sexodrome où l’on consomme du plaisir en conserve, celle des mauvais boulots glanés à l’arraché, qui usent les forces et vident du cœur à l’âme tant ils ignorent ce que vous seul savez être et rêvez de montrer ; celle, enfin, de ce fameux frère dont il se croit - se veut ? - rejeté.
On a d’abord l’irrésistible tentation d’aller flanquer une gifle à "celui des deux qui a réussi", à cet ingrat, ce florissant qui laisse son cadet se dessécher sur pied ; et puis on comprend peu à peu que l’histoire n’est pas si simple, que si Alexandre n’exprime jamais la moindre haine envers son aîné, c’est sans doute parce qu’à l’heure où il achève ce roman-cri, ce voyage au bout d’une certaine nuit, il a déjà compris que pour que Grégory revienne dans son existence, il faudrait que celui-ci soit sûr que c’est lui qu’on attend, et non ce qu’il représente : une réussite impossible à partager.
Avec ce livre, Alexandre Moix, on le devine, on le lui souhaite, va enfin passer de l’envie à la vie. On l’attend en confiance pour la suite d’une œuvre qui n’appartiendra qu’à lui.
Alexandre Moix, Second rôle, Ed. Carnot, 2005, 188 pages, 14 €
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