Children

Un peu à la manière d’un Mike Leigh, Ragnar Bragason scrute un microcosme familial au bord de l’implosion. Emmené par des acteurs formidables, Children nous rappelle que le cinéma islandais se porte bien, merci !

L’argument : Karitas est une mère célibataire de quatre enfants. Elle ne prend pas conscience de ce qui arrive à son fils de douze ans, Gudmundur, qui est le souffre-douleur de ses camarades de classe.
Son seul ami dans ce monde est Marino, un schizophrène d’une quarantaine d’années, qui vit avec sa mère. Quand Marino réalise que sa mère a rencontré un homme en secret, il commence à perdre pied avec la réalité.
Gardar est une petite frappe dont la conduite nuit à son frère jumeau Georg. Rejeté à la fois par le milieu et par sa famille, il doit prendre un nouveau départ dans la vie, et décide de partir à la recherche de son fils, Gudmundur, qu’il n’a jamais vu.

Notre avis : Au cœur de Children : la décomposition de la cellule familiale. S’inscrivant dans la veine du réalisme social, le film s’attache plus particulièrement à la relation mère-fils dépeinte comme un fragile jeu d’équilibriste. Ici la mère est invariablement en difficulté. Veuve, divorcée ou célibataire, elle affronte seule les problèmes financiers et le handicap d’un fils, tout en peinant à trouver un équilibre entre son épanouissement personnel et le bien-être de sa famille (ou de ce qu’il en reste). Children est aussi une œuvre intimiste : un regard suffit ici à révéler les conflits larvés et les drames latents.
Children repose sur un savant montage. Comme un puzzle, le métrage prend forme pièce par pièce. Le travail d’improvisation, mené plusieurs mois durant par le réalisateur et ses comédiens pour échafauder les personnages, se ressent. Chaque protagoniste est ainsi doté d’une vie propre. Mais cette complexité est toujours mise in extremis au service de l’intrigue, de sorte que chacun apporte sa pierre à l’édifice final. Le dénouement justement, tout en remettant un peu de baume au cœur laissera un goût amer : les conditions d’une réconciliation entre Gardar et son fils ne seront réunies que parce qu’un autre, en l’occurrence Marino, aura pris à son tour le chemin de la destruction.
Imposé par le budget, le noir et blanc accentue la blondeur toute scandinave du jeune Gudmundur protégé par un halo de lumière, tout en exacerbant la folie et la frustration qui traversent le film de part en part. De sorte qu’au final on ne regrette pas la couleur et c’est tant mieux.
Filmé du point de vue des enfants comme son nom l’indique, Children est le premier volet indépendant d’un diptyque mettant en scène les relations parents enfants. À suivre donc...