Le 2 août 2025
Le portrait d’une jeunesse désabusée et silencieuse pour s’interroger de manière universelle sur le pouvoir, l’exploitation, les valeurs morales et la nature humaine.
- Réalisateur : Keff
- Acteurs : Liu Wei Chen, Rimong Ihwar, Devin Pan, Yu Ann-shun, Yi-jung Wu
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters
- Nationalité : Taïwanais
- Distributeur : Tandem
- Durée : 2h15mn
- Titre original : Locust
- Âge : Interdit aux moins de 12 ans
- Date de sortie : 30 juillet 2025
- Festival : Festival de Cannes 2024, Reims Polar 2025
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Résumé : À Taïwan, Zhong-Han, un jeune homme mutique d’une vingtaine d’années, mène une double vie. Employé dans un restaurant familial le jour, il rackette en bande la nuit pour le compte de parrains locaux. Mais le rachat du restaurant par un homme d’affaires véreux met en danger ses proches, et oblige Zhong-Han à affronter son propre gang.
Critique : Sélectionné à la Semaine de la Critique du Festival de Cannes 2024, Gangs of Taïwan est le premier long-métrage de Keff, un réalisateur taïwanais-américain qui a grandi à Hong Kong, dont les deux courts-métrages ont été remarqués dans bon nombre de festivals asiatiques. S’inspirant des témoignages de jeunes Taïwanais en butte aux sempiternelles menaces d’invasion de leur voisin chinois, il dresse le tableau implacable d’une génération déchirée entre violence et amour.
Un commerce diffuse les images des multiples vagues de contestation en provenance de Hong Kong, contre la tutelle chinoise. Les Taïwanais le savent. Leur île est sur la liste des prochains projets d’extension de la Chine qui a déjà fait pression économiquement et diplomatiquement sur le monde pour les isoler. Pourtant, ces reportages ne suscitent que peu d’intérêt sur ses habitants. Ils préfèrent s’enthousiasmer pour l’arrivée d’une nouvelle pâtisserie (l’éclair coréen) tout juste élaborée par un célèbre chef français.

- Copyright Tandem
La résignation s’est emparée des plus âgés, à l’image de Yu-Jie et de son épouse I-Ju, qui n’ont d’autre ambition que de pouvoir continuer à faire vivre leur modeste restaurant. Pour les jeunes qui rêvent d’une ascension sociale inaccessible, il reste les règlements de comptes entre bandes rivales pour se donner l’illusion de la domination dans un monde régi par la misère, la corruption et les injustices.
Dans un premier temps, le film revêt tous les atours du film de gangsters : le caïd local qui fait régner la terreur tant auprès de ses victimes que de ses ouailles, les bagarres de rues, les ambiances moites et les lumières surchargées. Juste le temps de craindre que le récit ne s’enlise dans une succession gratuite de rixes urbaines, et voilà qu’émerge lentement mais sûrement l’observation brute du mal-être de toute une génération laminée par le cynisme de ceux qui sont censés les protéger. Se dessine alors le paysage social et politique d’un pays qui a abandonné sa jeunesse, symbolisée par le mutique Zhong-Han, condamné au silence physiquement et moralement.

- Copyright Tandem
Notre héros au visage d’ange traîne son ennui au fond de la gargote de ses parents dans la journée, s’invente une vie de voyou de grand chemin au contact de ses amis racketteurs la nuit, quand il ne s’étourdit pas sous les néons glauques d’une boîte de nuit. Sa rencontre avec une jeune femme sincère et aimante ouvre quelque lueur dans ce marécage de solitude et de désœuvrement. Une nouvelle fois, son appartenance à une classe sociale défavorisée le transforme en proie facile pour des dirigeants sans scrupules.
Au cœur d’une mise en scène parfaitement maîtrisée, Keff bâtit une œuvre rêche mais élégante adoucie d’une pudique langueur, de manière à éviter tout risque de misérabilisme.
Se nourrissant avec la même voracité de l’énergie du drame, de l’acuité du polar et du trouble de l’amour, Gangs of Taïwan brasse avec un égal bouillonnement violence et tendresse, désordre et indulgence pour porter haut et fort le combat de ces enfants injustement condamnés au silence.
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