Le 17 mai 2025
Un film chantant incontestablement brillant mais dont la surenchère de bruits, mouvements et couleurs finit par desservir la cause, à savoir la mobilisation d’étudiants chiliennes en 2018 pour défendre leur droit à une intégrité sexuelle et physique.


- Réalisateur : Sebastián Lelio
- Acteurs : Daniela López, Avril Aurora, Lola Bravo
- Genre : Comédie dramatique, Comédie musicale
- Nationalité : Chilien
- Distributeur : Metropolitan FilmExport
- Durée : 2h09mn
- Titre original : La Ola
- Date de sortie : 5 novembre 2025
- Festival : Festival de Cannes 2025

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– Festival de Cannes 2025 : Sélection officielle, Cannes Première
Résumé : Des vagues de changement éclatent sur le campus, et parmi l’occupation et les rassemblements se trouve Julia, une étudiante en musique qui rejoint la cause pour dénoncer le harcèlement et les abus subis par les élèves depuis bien trop longtemps. Mais tandis qu’elle chante et danse au rythme des chants, un épisode mystérieux la hante : une rencontre déroutante avec Max, l’assistant de son professeur de chant. Que s’est-il passé cette nuit-là ? Était-ce juste un rendez-vous de plus ? A-t-elle donné son consentement ? Ou était-ce bien pire ? Prise par l’euphorie collective et ses propres fantômes, Julia devient le cœur du mouvement. Son témoignage, intime et complexe, devient une vague qui secoue, perturbe et redéfinit une société polarisée.
Critique : Le Chili est un pays dont on voit trop peu de films. Pour le coup, La Vague s’annonce comme ambitieux, rempli de rage et d’enthousiasme, et porté par une musique grandiloquente qui rythme chacune des nombreuses scènes. L’enjeu est de taille puisque le sujet traite des révolutions estudiantines de 2018, portées par des jeunes femmes qui voulaient mettre fin au harcèlement sexuel permanent qu’elles subissaient de leurs pairs ou des professeurs, quand il ne s’agissait pas de viols purement et simplement restés impunis. Julia demeure le porte-flambeau principal de cette colère qui emporte avec elle tout un groupe issu des enseignements en musique ou théâtre. Elles ne font pas que crier leur ras-le-bol : elles le chantent et le dansent avec une passion infinie.
La Vague est réalisé par le brillant cinéaste Sebastián Lelio dont l’œuvre s’attache essentiellement à décrire des portraits de femmes émancipées, qui expérimentent leur liberté reconquise dans des destins hors du commun. Ce long-métrage n’échappe pas à la règle. Les hommes sont présents certes, mais surtout regardés pour les agressions sexuelles qu’ils commettent en toute impunité. Le film s’intéresse à toute une bande de jeunes femmes en colère, prêtes à renoncer à leur bourse, à leur qualification pour faire droit au respect de leur intégrité physique, psychologique et sexuelle. Elles forment ainsi un groupe joyeux, motivé, engagé, qui se drape sous les bannières d’un féminisme contemporain. Mais le récit ne fait pas que regarder la manière dont elles structurent leur parole, mobilisent les étudiantes attachées à leur cause : il s’intéresse à Julia qui peu à peu se rend à l’évidence qu’elle-même a été abusée.
- Copyright Diego Araya
À une année d’intervalle, il est difficile d’échapper la comparaison avec Emilia Pérez, le brillant film de Jacques Audiard. Le propos est totalement différent, mais les deux films, très denses, empruntent la voie de la danse et de la comédie musicale pour dérouleur leur histoire. Comparaison n’est pas raison, car La Vague n’a évidemment pas la même puissance. Mais il y a un talent certain chez Lelio à manier les images, diriger les acteurs et les chorégraphies, ainsi que jouer avec les sons et la musique. Du coup, il se dégage beaucoup d’énergie et de force dans cette saga chantée où les actrices se donnent beaucoup de plaisir à chanter et à danser.
Petit bémol d’importance : la mise en scène en fait beaucoup. D’abord, on pourra regretter une longueur trop importante, avec une surenchère narrative qui finit par épuiser le spectateur. L’énergie est très forte, mais finit pas se retourner contre elle-même et donner parfois l’impression d’un trop plein de sons, musiques, couleurs. Le film est très bruyant et l’on peut alors craindre que l’exagération et l’amplification sonores ne se retournent contre l’intérêt même du long métrage : la défense des femmes victimes de violences sexuelles. Les comédiennes sont parfaites dans ce flamboyant charivari de colère, joie, rire et larmes. L’interprète principale, Daniela López, est épatante de souffle et de conviction, enchaînant dialogues, danses et chants sans jamais faillir à la fatigue.
- Copyright Diego Araya
Le film d’ailleurs étaye bien la difficile frontière entre ce que serait un rapport consenti ou pas, d’autant quand il y a entre les deux personnes un désir partagé et la volonté de construire une histoire commune. On n’aimerait pas être magistrat acculé à trancher sur des sujets aussi périlleux, les hommes se réfugiant toujours sur le consentement de leur victime.
La Vague représente la puissance de ce mouvement féminin qui se déferle sur l’université. Beaucoup de jeunes gens se reconnaîtront dans ces caractères tranchés, cette volonté de bousculer les normes et le patriarcat qui continue de ronger la plupart des sociétés humaines. Maintenant, on aurait attendu un peu plus de calme, de rondeurs dans un film qui va dans tous les sens. Parions de toute façon qu’il fera bouger les lignes dans les pays ou communautés où l’on considère encore le corps de la femme comme un objet soumis aux volontés des hommes.
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