Le 4 septembre 2024


- Scénariste : Fabien Toulmé>
- Dessinateur : Fabien Toulmé
- Collection : Encrages
- Genre : Roman graphique, Société
- Editeur : Delcourt
- Famille : Roman graphique
- Date de sortie : 5 juin 2024
Résumé : Fabien Toulmé continue son tour du monde, au Texas, aux Comores et en Corée du Sud, pour interroger des gens ordinaires sur leur rapport au travail, et désormais l’idée de vivre également...
Critique : Pour ce deuxième opus des Reflets du monde, Fabien Toulmé continue de voyager, mais cette fois son thème n’est plus la lutte, mais bien le travail. Enfin, un peu plus que cela, puisque le redoublement de la conjonction de coordination "et" dans son titre montre une volonté d’inverser les rôles, de repolariser, de prioriser autre chose, entre "travailler" et "vivre". Car c’est bien le second verbe qui prendra le pas sur le premier, même si les hommes et femmes ont eu en commun une culture et une habitude du travail que l’on pourrait qualifier de forte, voire d’extrême. Cela va de l’ouvrière agricole des Comores, qui marche autant qu’elle travaille pour accéder aux plantations, de l’ancien homme d’affaire américain qui a préféré tout arrêter pour sa santé et pour l’amour de la musique, ou bien la famille coréenne qui a vu le fils justement céder d’une crise cardiaque avant ses trente ans... Ces témoignages sont autant poignants qu’ils sont insérés dans une vie très ordinaire, ils sont aussi individuels qu’universels, ils racontent tous quelque chose de la vision du travail qui est en train de changer, d’évoluer, en particulier depuis la crise du Covid. Fabien Toulmé se fait donc le reporter graphique qui compile, sans jugement mais avec une douce empathie.
© Delcourt / Toulmé
En effet, si dans En Lutte on avait une vision évidemment partisane, l’auteur se contente ici de dessiner avec une compassion étendue, en imaginant les vies qu’il décrit, présente ou passé. S’il peine pour accomplir le trajet des Comoriennes, s’il acquiesce avec sourire aux frasques du Texan, il semble contenir ses larmes lors du récit des parents coréens. Le style ne varie plus chez Toulmé : les couleurs sont là pour égayer des planches qui reprennent des personnages toujours doux, les traits ne coincent pas, l’humanité se retrouve entièrement dans cette rondeur bonhomme, ces tailles toutes en formes, ces petits yeux qui n’aspirent qu’à rencontrer et apprécier l’autre. En fait, ce dessin fait du bien au lecteur.
© Delcourt / Toulmé
Entre reportage, roman graphique et témoignage des autres, Fabien Toulmé continue de faire vivre des gens lointains, dont les vies paraissent éloignées au premier abord mais dont les sentiments nous rapprochent intensément et irrémédiablement, et c’est bien là son talent.
360 pages – 25,95 €