Critique

LIVRE

Professeurs de désespoir - Nancy Huston

Détruire, disent-ils

Le 1er septembre 2004

Nancy Huston pourfend avec passion le néantisme et se fait le chantre d’une littérature à visage humain.


  • Professeurs de désespoir - Nancy Huston

    Comment Nancy Huston, qui se dit belle et intelligente – et elle l’est – a-t-elle pu passer ainsi à côté d’un écrivain comme Thomas Bernhard ? Comment n’a-t-elle pas compris qu’au fond du désespoir il donnait ses lettres de noblesse à la littérature, que lorsqu’il pourfend les artistes, écrivains et autres, c’est parce qu’il les aime, que son exigence artistique est telle qu’aucun ne peut la satisfaire ? C’est cette soif d’absolu à laquelle rien ne peut répondre qui en fait le grand écrivain qu’il est. Que Nancy Huston relise "Maîtres anciens" qui contient la plus belle déclaration d’amour qui soit : "J’ai tiré plusieurs tiroirs de plusieurs commodes et j’ai regardé dedans et, toujours à nouveau, j’ai sorti des photos et des écrits et des correspondances de ma femme, et j’ai posé toutes ces choses l’une après l’autre sur la table et je les ai toutes regardées l’une après l’autre, mon cher Atzbacher, comme je suis honnête je dois dire qu’en même temps je pleurais. Soudain j’ai donné libre cours à mes larmes, je n’avais plus pleuré depuis des années et tout d’un coup j’ai donné libre cours à mes larmes, voilà ce qu’a dit Reger. J’étais assis là et je donnais libre cours à mes larmes et j’ai pleuré, pleuré, pleuré, pleuré, voilà ce qu’a dit Reger. Depuis des décennies je n’avais plus pleuré, plus depuis mon enfance, et tout d’un coup j’ai donné libre cours à mes larmes, m’a dit Reger à l’Ambassador… " Quant à la comparaison plus que douteuse avec Hitler, je préfère la laisser tomber.

    Voir en ligne : l’oeil culturel

    • Bliss 22 septembre 2004
      Professeurs de désespoir - Nancy Huston

      Je remercie Huston du fond du coeur pour avoir écrit ce livre, ô combien vital dans notre vieille Europe malade qui n’est pas sortie du décadentisme à la Rops. C’est l’art qu’on assassine ! La beauté, aussi, traquée partout.
      Une bouffée d’oxygène, donc, que cet essai magnifique qui pourfend avec intelligence, humour et lucidité quelques-uns de ces " professeurs de désespoir " si à la mode dans nos contrées capitalistes et trop bien nourries (dans la même veine, il faut citer l’essai de Lucien-Samir Oulahib, " Ethique et épistémologie de nihilisme. Les meurtriers du sens ", chez l’Harmattan).
      Et cette parole magnifique de Romain Gary, désespéré romantique à des lieux de ces nihilistes modernes qui se complaisent dans le glauque, le sordide et la misogynie, inscrite en épigraphe au dernier chapitre :
      " Le néant ne se place au coeur de l’homme que lorsqu’il n’y a pas de coeur ".

      Le monde a le sens que nous lui donnons.

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