Le 5 septembre 2019
Le mariage de Verida est une plongée courageuse au cœur de la Mauritanie où se jouent, autour d’une jeune héroïne, les tensions entre l’aspiration à la modernité et la perpétuation des traditions culturelles. Intéressant et mystérieux, à la limite parfois de la démagogie.
- Réalisateur : Michela Occhipinti
- Acteurs : Verida Beitta Ahmed Deiche, Amal Saad Bouh Oumar, Aichetou Abdallahi Najim
- Genre : Drame
- Nationalité : Italien
- Distributeur : KMBO
- Durée : 1h34mn
- Date de sortie : 4 septembre 2019
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Résumé : Verida est une jeune femme mauritanienne. Elle partage sa vie entre son travail d’esthéticienne dans un salon de beauté et les sorties avec ses amies. Un matin, sa mère lui annonce qu’elle lui a trouvé un mari. Commence alors la tradition du gavage, on lui demande de prendre du poids pour plaire à son futur mari. Alors que le mariage approche, Verida a de plus en plus de mal à supporter cette nourriture en abondance, le changement de son corps et l’idée de se marier avec un homme qu’elle n’a pas choisi.
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Notre avis Les sociologues parlent souvent de la difficulté pour les jeunes issus de l’immigration à se situer entre leur culture d’appartenance et celle de leurs parents. Cette fois, le premier film de l’Italienne Michela Occhinpinti emprunte la voix inverse des théories sociologiques, pour s’intéresser au point de vue d’une jeune mauritanienne, Verida, promise à un mariage contraint, partagée entre le souci de conserver les habitudes culturelles transmises par sa famille, et celui de recouvrir une liberté de pensée et d’action, à l’instar de ce qu’elle imagine de la société occidentale. Le long métrage est essentiellement un récit de femmes. Les hommes y sont rares ou occupent des rôles secondaires. Il n’est donc pas directement question de la domination masculine sur les femmes. Et curieusement, le film montre que le conservatisme culturel, qui va jusqu’à des formes de mutilation corporelle, se transmet par l’intermédiaire des femmes.
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En ce sens, Le Mariage de Verida est très ambigu. Pendant tout le film, on a du mal à percevoir ce qui motive la jeune fille dans sa soumission aux préparatifs de ce mariage forcé. Elle paraît tout autant actrice que victime de ce modèle culturel. En effet, le film raconte l’obligation qui lui est faite de grossir trois mois avant le mariage, le poids du corps étant manifestement associé à la beauté, à la manière des nymphes des siècles passés en Europe. Le régime auquel elle doit se conformer est un gavage et il est exprimé comme tel par les protagonistes de l’histoire. La pauvre Verida doit avaler jusqu’à dix repas par jour, se coltiner les boucheries et les marchés pour atteindre les vingt kilos espérés avant le mariage. Le dégoût accapare l’écran, et on se demande comment la jeune fille ne succombe pas à l’addiction alimentaire.
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Le plus réussi de ce film demeure la question sensible des relations mère-fille et des relations d’amitié entre filles. Une très jolie scène rassemble un groupe de femmes, peu avant le mariage d’une d’entre elles, et l’on appréhende la force de la pression sociale et culturelle, tout autant que l’on se rend compte de l’aspiration légitime à la liberté, à l’Occident et à l’argent. La mère de Verida, dans cette tension-là, est tout autant détestable que compatissante, ayant elle-même vécu un semblable rite avant le mariage. Beaucoup de films traitent de la condition féminine en Afrique, mais rarement du point de vue des régimes grossissants terribles, auxquels les femmes doivent se soumettre. Pour autant, le scénario, du coup, passe à côté du sujet central, à savoir le mariage contraint. Cela relève évidemment du choix scénaristique de la réalisatrice, mais au fur et à mesure du déroulement du récit, la place de la nourriture est si forte qu’elle obstrue totalement l’écran, au détriment de la question du mariage forcé.
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En tout cas, il y a une beauté magnétique qui émane de l’héroïne principale de ce film. La dernière séquence que met en scène l’affiche apporte à son personnage une dimension presque divine. Elle apparaît comme une icône de la liberté et de l’amour, en bord de mer, sans que l’on sache vraiment le destin qui attend cette femme. Mais sans doute aurait-on aimé plus de colère, de fougue, jusqu’au sacrifice. La réalisatrice opte pour un naturalisme quiet, qui parfois, pourrait faire douter de ses intentions en matière d’émancipation féminine.
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