Les fraises sauvages - Ingmar Bergman - critique

Critique : Borg va se présenter lui-même par l’intermédiaire de sa voix off qui commentera tout le récit. Maintenant reclus et veuf, il se plaît à être materné par Agda, qui le traite comme un galopin capricieux. Il héberge temporairement sa belle-fille Marianne (Ingrid Thulin), en froid avec son mari Evald (Gunnar Björnstrand) resté à Stockholm. La veille du départ en avion, il va faire un cauchemar, auquel on assiste, dans lequel il va croiser son propre cercueil. Ce désagréable souvenir matinal va l’inciter à prendre sa voiture plutôt que l’avion. Marianne, souhaitant rentrer chez elle, lui propose de l’accompagner.

Sorte de road movie avant l’heure, le film ni gai, ni triste, va alterner rêves du vieillard et réalité. Ce sera pour lui une mise au point de toute sa vie, et une prise de conscience de son égoïsme viscéral sous ses airs bonhommes. C’est ce que sa belle-fille ne va pas manquer de lui assener dès le début de ce voyage qui durera une longue journée. Le périple va prendre une tournure plus légère et nostalgique quand Borg va rencontrer Sara (Bibi Andersson) une auto-stoppeuse qu’il découvre face à la maison de son enfance, devant laquelle il a souhaité s’arrêter en passant. Il retrouve dans les traits de la jeune femme, sa cousine, amour déçu de sa jeunesse. Il accepte de la prendre dans sa voiture avec ses deux acolytes de vacances, Anders (Folke Sundquist) et Viktor (Björn Bjelvenstam).

Ingmar Bergman, après les succès du libertin Sourires d’une nuit d’été (Sommarnattens leende, 1955) et du médiéval Le Septième Sceau (Det sjunde inseglet, 1957), sera également célébré pour ce long métrage dans lequel un vieil homme fait lucidement le bilan de sa vie. Il est dit que le cinéaste a mis beaucoup de lui-même dans ce personnage contrasté. Vrai ou pas, le film est une véritable réussite, trouvant un bel équilibre entre rêve et réalité, révélant ainsi le bilan mitigé d’une vie réussie juste en apparence.

Victor Sjöström, cinéaste et acteur mythique suédois ayant débuté à l’époque du muet, livrera ici sa dernière composition. Bibi Andersson, déjà une fidèle du réalisateur, y croise Ingrid Thulin, une nouvelle venue du cinéma bergmanien. Les deux actrices seront (avec Liv Ullmann) les interprètes favorites de Bergman tout au long de sa longue carrière théâtrale et cinématographique.

Le film recevra, entre autres récompenses, l’Ours d’Or à la Berlinale 1958.