Le 4 janvier 2015
Sur un canevas convenu, Pernille Fischer Christensen signe un film inégal, qui alterne subtilités et balourdises.
- Réalisateur : Pernille Fischer Christensen
- Acteurs : Trine Dyrholm, Mikael Persbrandt
- Genre : Drame
- Nationalité : Danois
- Durée : 1h35mn
- Date de sortie : 21 janvier 2015
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Sur un canevas convenu, Pernille Fischer Christensen signe un film inégal, qui alterne subtilités et balourdises.
L’argument : Après des années à Los Angeles, Thomas Jacob, célèbre chanteur au parcours chaotique, revient enregistrer son nouvel album au Danemark. Sa fille Julie, qu’il n’a pas vue depuis des années, en profite pour réapparaitre dans sa vie et lui présenter son petit-fils Noah. Thomas s’est détourné de sa famille et c’est bien malgré lui qu’il doit s’occuper du jeune garçon. Sa relation avec son petit-fils évolue et il est bientôt confronté à un choix qui pourrait bouleverser sa vie.
Notre avis : Le film commence comme il se termine, par un concert, avec la même première phrase adressée (à peine) au public. La différence, c’est évidemment qu’entre les deux, Thomas, la rock star vieillissante, a changé et que son petit-fils lui adresse un sourire depuis les coulisses. On mesure, en lisant le synopsis, les écueils qui menacent la réalisatrice : comment éviter les effets larmoyants, comment rendre crédible la transformation du personnage principal, qui doit passer de misanthrope bourru à grand-père aimant ? Faut-il verser dans le mélo (forcément flamboyant) ou jouer la retenue et viser la pudeur ?
© Rolf Konow © Zentropa Productions2
La mode n’est plus aux grands sentiments à la Douglas Sirk ; nous préférons aujourd’hui le drame sous-jacent, la litote à l’excès. Le lacrymal suscite le ricanement, c’est ainsi. Au risque, et Someone you love n’y échappe pas, d’une certaine sécheresse ; à force de contenir l’émotion, elle finit par ne plus exister. Certes, tout cela demeure subjectif : là où, il faut le confesser, nous sommes resté de marbre, d’autres sans doute seront émus. Mais ce personnage antipathique, froid, distant, qui reçoit sa fille comme pour un rendez-vous d’affaire ; ce petit-fils grandi trop tôt, enfant apeuré et en même temps pleinement conscient de ce qui se joue ; cette histoire d’humanisation en quelques plans ; tous ces poncifs et d’autres encore (rock, drogue, vide à combler, incommunicabilité) peuvent-ils vraiment émouvoir, surtout quand ils sont énoncés avec platitude ?
Heureusement, Pernille Fischer Christensen, dont c’est le quatrième long-métrage, dispose de quelques atouts qui empêchent le film de sombrer : une direction d’acteur impeccable, de beaux moments musicaux, la photogénie de la neige. On gardera en tête la scène du duo chanté, qui baigne dans une lumière chaude et parvient à toucher. Les deux personnages vivent une réelle complicité, fruit d’un passé dont nous ignorons tout – et c’est tant mieux : le mystère qui nimbe leur relation est mille fois plus efficace que tel monologue explicatif. Surtout, à trois reprises, la mise en scène efface le cliché par des trouvailles délicates : la découverte du cadavre, d’abord, qui se fait par le point de vue de Thomas ; son parcours aboutit au regard fixe de Noa, et c’est ce regard qui désigne le corps. Tout est dit, sobrement, justement.
© Rolf Konow © Zentropa Productions2
Deux autres séquences, qui se font écho, ont retenu notre attention : dans la première, Thomas est en studio et nous voyons son reflet dans la vitre. Derrière elle apparaît Noa et leurs deux visages vont fusionner. Symboliquement, le rapprochement s’opère à ce moment, même s’il ne s’agit que d’un reflet, donc d’une apparence. Cette scène trouve son sens par son pendant au moment où le cercueil est porté dans le corbillard : Thomas est au premier plan, Noa et les croque-morts sont devant, et flous. Quand le grand-père se rapproche, il touche l’enfant qui, à son tour, devient net. Belle idée que ce jeu sur l’image pour représenter l’inexprimable ; les deux personnages deviennent proches, mais ils sont surtout au clair avec leurs sentiments et leur position dans le monde. La fin le confirmera, mais, hélas, de manière pataude, à l’internat, comme s’il fallait souligner ce que nous avions compris, ce que la mise en scène nous avait montré.
Difficile de porter un jugement d’ensemble sur le film, tant il est inégal ; disons que sur un sujet casse-gueule, prévisible et fade, la réalisatrice parvient, par la grâce de quelques moments de pure mise en scène, à sauver l’entreprise de la banalité.
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