Rencontre du 3e type
Le 31 octobre 2014
Envoûtante et déroutante, l’adaptation du roman de science-fiction de Michel Faber, est surtout un exercice de style fascinant qui imprègne les sens par son étrangeté.


- Âge : Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs
- Réalisateur : Jonathan Glazer
- Acteurs : Scarlett Johansson, Jeremy McWilliams, Lynsey Taylor Mackay, Dougie McConnell, Kevin McAlinden
- Genre : Science-fiction
- Nationalité : Britannique
- Editeur vidéo : Diaphana Edition Vidéo
- Date de sortie : 25 juin 2014
- Durée : 1h47mn
Sortie DVD & blu-ray : le 29 octobre 2014
Envoûtante et déroutante, l’adaptation du roman de science-fiction de Michel Faber, est surtout un exercice de style fascinant qui imprègne les sens par son étrangeté.
L’argument : Une extraterrestre arrive sur Terre pour séduire des hommes avant de les faire disparaître.
Notre avis : Rare (3 films en 14 ans), Jonathan Glazer ne peut pas être taxé d’opportunisme. Son oeuvre, en parfaite évolution, dont la genèse est l’univers libre du clip (ses vidéos pour Blur, Massive Attack et Radiohead sont des références), est passée du polar noir britannique (Sexy Beast, 2000) au drame familial américain glacial (Birth).
Après avoir conduit Nicole Kidman dans un exercice de folie, aux portes du fantastique et de la réincarnation dans Birth, il embarque aujourd’hui Scarlett Johansson dans l’une des œuvres les plus singulières vues ces dernières années, qui va dérouter les fans les plus fidèles de la star féminine d’Avengers.
© Seventh Kingdom 2013
L’adaptation du roman éponyme de Michel Faber, publié en 2000, revêt une forme particulièrement étrange à l’écran. Ce récit épuré d’une extra-terrestre qui, comme le résume brièvement le synopsis, "arrive sur Terre pour séduire des hommes avant de les faire disparaître", s’inscrit dans une recherche de style presque antinomique. Le réalisateur expérimente, trouvant l’inspiration dans l’extase esthétique qu’il appose à une approche naturaliste d’un projet caverneux. Scarlett Johansson, alien de charme, sort de sa grotte pour parcourir les chemins obscurs d’un monde terrestre qui lui est étranger. Dans une Ecosse profondément sociale et cinégénique, où ses victimes sont des anonymes, des acteurs amateurs qui confèrent à l’image travaillée un caractère quasi documentaire, l’on est fasciné par cette errance dans des limbes oniriques, cauchemardesques. L’incroyable rareté du dialogue, l’omniprésence des silences et la musique exceptionnelle de Mica Levi, qui donne une texture discordante très années 70 aux images irréelles du cinéaste, plongent le spectateur dans une transe hypnotique que d’aucuns pourraient trouver soporifique, dans tous les cas en dehors des canons commerciaux du cinéma contemporain.
© Seventh Kingdom 2013
Magnifique à bien des égards, constamment fascinant, défiant l’espace et le temps comme tout beau projet de science-fiction devrait être capable de le faire, Under the skin interpelle, choque et provoque par ses solitudes exposées à l’écran. La nudité des acteurs, l’approche éminemment sexuelle, la forte intériorité des émotions, sont autant de facteurs qui rendent la projection parfois inconfortable, alors que le réalisateur abandonne un bébé, seul dans une nature inhospitalière, après le meurtre sauvage de son père, ou filme avec pudeur le rapprochement entre la belle étrangère et un homme défiguré par des tumeurs au visage, qui le font paraître lui-même d’un autre monde.
Projet indomptable qui aime s’égarer dans ses propres vertiges esthétiques, Under the skin est une troublante leçon de cinéma, la convocation d’un univers personnel qui déconstruit toutes les formules du genre, pour ne ressembler qu’à lui-même. Audacieux est le mot.
Le test blu-ray :
Edition techniquement probante de ce film de S.F. radical, à la contemplation poétique et macabre, qui a emballé plus de 140.000 spectateurs en France. Un beau score pour un film d’auteur, un vrai. L’un des plus grands films de 2014.
Les suppléments :
On apprécie l’authenticité des suppléments qui donnent la parole tout d’abord à un expert, Olivier Père, qui présente la filmographie de Jonathan Glazer et qui analyse joliment ce film, le rapprochant notamment de 2001 de Kubrick.
C’est ensuite l’équipe de Under the skin qui vient donner de la chair textuelle à ce film abscons. 28mn d’entretien avec Jonathan Glazer, ses producteurs, la responsable du casting, le monteur... Le travail d’adaptation, le casting de la star, mais aussi des non professionnels, le montage, les effets spéciaux ou la musique sont passés au crible...
Attention, Scarlett Johansson, qui s’est mise à nu dans le film, manque à l’appel dans cette section.
L’image :
Le master 16/9 au ratio image 1.85 est remarquable en dépit des nombreuses séquences nocturnes ou de la faible luminosité générale du métrage. Celui-ci se déploie avec profondeur quand il le faut, permettant une bonne appréhension de la composition du décor (premier et arrière plan) sur laquelle le cinéaste aime jouer.
Le son :
Le caractère documentaire du film ne profite pas aux dialogues, forcément faibles, même en DTS HD Master Audio, mais en revanche, le dispositif HD se justifie par la puissance musicale, envoûtante, spectrale, et puissante... Le blu-ray nous permet de baigner dans cette étrange bande son, en 2.0 ou 5.1. Pas de piste française, le film est sorti exclusivement en version originale.
Vos avis
11 août 2014, par Oscar Nimier
C’est beau, très beau, comme l’innocence, comme l’ignorance de l’air, comme l’amour qui meurt chaque instant et tout ces autres instants qui arrivent encore .
Elle est la mort qui rôde, sans volonté, sans but,sans issue, sans arrêt possible, elle tente de comprendre la vie et d’aimer. Vivre c’est le plaisir, la douleur et la fin, c’est aimer ; aimer c’est l’acceptation de mourir, puisque ça ne peut que finir un jour .
Il n’y à rien de dicible dans ce film ! elle est le tout, l’innocente fin perpétuelle de la beauté .