Le 1er août 2025
La plus grande œuvre du cinéma algérien, entre lyrisme et épure. La force épique au service d’une cause politique est la qualité première de ce film rare, Palme d’or à Cannes en 1975.
- Réalisateur : Mohammed Lakhdar Hamina
- Acteurs : Cheikh Nourredine (Noureddine Meziane), Jacques Richard, Yorgo Voyagis, François Maistre, Larbi Zekkal, Hassan El-Hassani , Leila Shenna
- Genre : Drame, Historique, Politique
- Nationalité : Algérien
- Distributeur : Les Acacias
- Durée : 2h57mn
- Reprise: 6 août 2025
- Titre original : Waqai sinin al-djamr
- Date de sortie : 26 novembre 1975
- Festival : Festival de Cannes 1975, Festival de Cannes 2025
L'a vu
Veut le voir
– Reprise en version restaurée : 6 août 2025
Résumé : Ahmed, paysan pauvre, quitte son village pour la ville à la recherche d’une vie plus facile. Il rencontre Miloud, un fou visionnaire, et surtout la misère et l’injustice. Chronique événementielle de l’histoire algérienne, de la conquête française à 1954, date du déclenchement de la guerre de Libération nationale, le film relate, à travers la vie d’une famille et de quelques individus symboliques, la résistance du peuple algérien tout entier à l’expropriation de ses terres et à la déculturation.
Critique : Présenté en compétition au Festival de Cannes 1975, Chronique des années de braise reçut la Palme d’or décernée par le jury de Jeanne Moreau : une première pour un film africain. Ancien directeur de l’Office des Actualités Algériennes, Mohammed Lakhdar Hamina, également opérateur, avait signé trois longs métrages dont Le vent des Aurès (1966). Ce film avait été possible grâce à l’Office National pour le Commerce et l’Industrie Cinématographique, un organisme public que le réalisateur avait créé, et qui donna une impulsion au cinéma algérien. Vaguement inspiré de ses souvenirs d’enfance et de jeunesse (le réalisateur avait des parents agriculteurs, il s’est engagé pour l’indépendance de l’Algérie), le scénario de Chronique des années de braise a été coécrit avec Tewfik Farès. Le récit est découpé en six volets : Les années de cendre (la sécheresse, la pauvreté, l’exode rural), L’année de la charrette (la Seconde Guerre mondiale et ses effets), Les années de braise (dans l’après-guerre, la montée de la conscience politique face à la colonisation, L’année de la charge (les élections de 1947, le débat entre légalisme et combat armé), Les années de feu (les soulèvements dans les campagnes, la montée des maquis), Le 1er novembre 1954 (le début de la guerre d’Algérie).

- © 2025 Les Acacias. Tous droits réservés.
Mohammed Lakhdar Hamina s’inscrit dans la mouvance d’un cinéma ouvertement engagé, dénonçant les méfaits historiques du pouvoir colonial, comme l’avait proposé, dans un autre registre, Ousmane Sembène avec La Noire de… Car c’est bien l’injustice intrinsèque de la colonisation qui est montrée dans ce récit fleuve : expropriation de terres, utilisation d’une main-d’œuvre corvéable à merci, inégalité de statut juridique, utilisation des « indigènes » comme chair à canon. L’image des Français n’est guère présentée de façon glorieuse, à l’instar du contremaître odieux campé par François Maistre ou du policier brutal interprété par Jacques Richard. On ne saurait reprocher au réalisateur son manichéisme, tant les faits réels ont peut-être été plus terribles, et c’est aussi la marque de certains grands films politico-historiques de forcer le trait, du Cuirassé Potemkine d’Eisenstein à 1900 de Bertolucci. Ce qui n’empêche pas le cinéaste d’être plus nuancé quand il évoque par exemple le manque d’homogénéité du courant indépendantiste, avant le déclenchement de la guerre d’Algérie. Au sein de cette fresque grandiose, les personnages, même principaux, semblent secondaires, tant leur drame individuel se fond dans le collectif, à l’instar d’Ahmed, le protagoniste, qui passe de la frustration contenue à la revendication ardente.

- © 2025 Les Acacias. Tous droits réservés.
Soulignons ici la qualité d’un casting réunissant, entre autres, l’acteur grec Yorgo Voyagis, Cheikh Nourredine (Noureddine Meziane) et Mohammed Lakhdar Hamina lui-même, impressionnant dans le rôle du conteur semi-fou. Mais la grande réussite de Chronique des années de braise réside dans sa mise en scène, conciliant gigantisme et épure, avec un filmage magnifique du désert et une direction sans failles des nombreux figurants. L’usage pertinent du Scope, de l’élévation des grues ou des panoramiques confère au long métrage un souffle indéniable. Chronique des années de braise connut une carrière commerciale somme toute honorable pour un film africain, aidée par son prix cannois. Mohammed Lakhdar Halina, à qui d’aucuns reprocheront par la suite d’être devenu le « cinéaste officiel du régime », signera des longs métrages moins marquants, à l’instar de l’académique coproduction La dernière image (1986). Chronique des années de braise tomba quant à lui dans un injuste oubli, sans édition VHS ou DVD. Le film a été restauré en 4K par The Film Foundation et projeté dans la section Cannes Classics du Festival de Cannes en mai 2025, le jour même de la mort du cinéaste. Le distributeur Les Acacias en proposent une reprise en salle.
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.



















