Le 23 mai 2025
Un film absolument vivifiant et débordant de tendresse des deux réalisatrices Lise Akako et Romane Gueret, qui font honneur certes à la jeunesse des quartiers, mais finalement à toutes celles de France.


- Réalisateurs : Lise Akoka - Romane Gueret
- Acteurs : Amel Bent, Idir Azougli, Fanta Kebe, Zakaria-Tayeb Lazab, Shirel Nataf
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Français
- Distributeur : StudioCanal
- Durée : 1h52mn
- Date de sortie : 7 janvier 2026
- Festival : Festival de Cannes 2025

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– Festival de Cannes 2025 : Sélection officielle : Cannes Première
Résumé : Shaï et Djeneba ont vingt ans et sont amies depuis l’enfance. Cet été-là, elles sont animatrices dans une colonie de vacances. Elles accompagnent dans la Drôme une bande d’enfants qui comme elles ont grandi entre les tours de la place des Fêtes à Paris. À l’aube de l’âge adulte, elles devront faire des choix pour dessiner leur avenir et réinventer leur amitié.
- © Festival de Cannes 2025
Critique : On a tous en souvenir un séjour en colonie de vacances avec son lot d’animateurs, de gamins turbulents et attachants et ces activités et chansons qui traversent le temps. Ma frère est justement un récit de colonie de vacances où deux jeunes femmes, décidées à fuir leur quartier le temps d’été, sont embauchées in extremis comme animatrices. Car la vie de la place des Fêtes à Paris n’est pas toute rose avec d’un côté un frère harceleur qui exige de sa sœur une soumission absurde à l’autorité masculine, et de l’autre une mère absente qui abandonne à sa voisine son petit dernier. Shaï et Djeneba ont tout à gagner dans cette parenthèse enchantée en ouvrant cette page estivale, et la magie du cinéma fait le reste.
Ma frère n’est pas un film misérabiliste sur les jeunes de banlieue. C’est un film sur l’enfance avec des airs lointains du film de Tavernier Ça commence aujourd’hui, où il était question d’une école primaire avec des enseignants passionnés et des enfants représentatifs des couches populaires de la société. Indéniablement, ces enfants qui vivent dans le quartier du 19e arrondissement de Paris, Place des Fêtes, ne sont pas des privilégiés mais donnent à voir toutes les palettes d’appartenance culturelle qu’un tel lieu offre. Il n’y a pas de parents dans ce récit, juste ces mômes et leurs animateurs, eux-mêmes à peine sortis de l’adolescence. Le film joyeux et attachant est ainsi construit sur des tranches de vie qui se succèdent avec au cœur du récit, Shaï et Djenaba. Les stéréotypes et les stigmates coexistent dans une farandole de joie, rires, pleurs et tendresse.
- Copyright StudioCanal
En même temps, le film ne passe pas à côté des choses graves et n’essaye pas d’enjoliver la réalité quotidienne des enfants et de leurs animateurs. Il est question des nombreuses interrogations qui traversent leurs univers : le racisme sous toutes ses formes, les transformations de l’identité sexuelle, le viol, la protection de l’enfance, les difficultés économiques etc. Mais il est largement aussi question d’amitié, d’amour, de découverte de l’autre, de joie d’être ensemble et de se réunir dans un lieu éloigné de la grisaille des quartiers. Pas de démagogie pour autant de la part des deux cinéastes. Le ton est toujours juste, bien écrit et sans frou-frou. C’est donc un film éducatif, au sens noble du terme, qui donnera aux jeunes et aux autres des opportunités d’identification.
La réussite du long-métrage tient à ses deux actrices principales, Shirel Nataf et Fanta Kebe. Elles illuminent l’écran, dans une langue solaire et attendrissante. On pense particulièrement à Adèle Exarchopoulos dans ses débuts à l’écran, qui avait et a toujours la même sincérité, le même aplomb et la même générosité. Elles ne trichent pas dans les émotions qu’elles dégagent, aux côtés d’Amel Bent, d’une grande présence, et d’Idir Azougli, qu’on a vu dans un film merveilleux, Météors (Un Certain Regard Cannes 2025). Lise Akoka et Romane Gueret réunissent toute la jeune garde du cinéma français qui témoigne, et c’est heureux, de la multiplicité culturelle de notre pays et des joyaux d’humanité qui fleurissent partout.
- Copyright StudioCanal
On avait repéré les deux réalisatrices à Cannes avec leur long-métrage Les Pires. Cette fois, si elles continuent d’aborder la question des jeunes de quartiers sensibles, le propos est plus joyeux, plus décalé, empruntant la Drôme comme espace aux enfants qui donnent à voir toute la richesse de leur caractère. Un petit regret : le film ne manque pas de chansons (ce qui devient une tendance assez lourde dans le cinéma actuel) et on aurait aimé entendre la voix d’Amel Bent plus souvent, ou celle des enfants interprétant ces chansons.
Le titre Ma frère s’explique par la diffusion dans le langage adolescent du masculin "frère" pour désigner ses amis, qu’ils soient des garçons ou des filles. On ne va pas s’opposer à l’évolution des langues populaires, mais tout de même le mot "sœur" aurait été plus adéquat. En effet, les deux jeunes femmes partagent une forme de sororité qui leur donne l’opportunité d’échanger en toute confiance, de se disputer aussi, et de s’accompagner dans un chemin de vie pas toujours aisé. Mais voilà, le film est dans l’air du temps et, à ce titre, adopte les langages dans lesquels les jeunes spectateurs pourront s’identifier.
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