Le 24 août 2022
Tenir sa langue est un récit intime et attachant, écrit avec fougue, avec une insolence tendre et délicate qui touche à l’essentiel de la littérature, aux mots et aux lettres qui se frottent, propriétés remises en cause et étrangères à apprivoiser.
- Auteur : Polina Panassenko
- Editeur : Editions de l’Olivier
- Genre : Roman, Récit
- Nationalité : Française
- Date de sortie : 19 août 2022
- Plus d'informations : Le site de l’éditeur
Résumé : Elle est née Polina, en France elle devient Pauline. Quelques lettres et tout change. À son arrivée, enfant, à Saint-Étienne, au lendemain de la chute de l’URSS, elle se dédouble : Polina à la maison, Pauline à l’école. Vingt ans plus tard, elle vit à Montreuil. Elle a rendez-vous au tribunal de Bobigny pour tenter de récupérer son prénom. Ce premier roman est construit autour d’une vie entre deux langues et deux pays. D’un côté, la Russie de l’enfance, celle de la datcha, de l’appartement communautaire où les générations se mélangent, celle des grands-parents inoubliables et de Tiotia Nina. De l’autre, la France, celle de la {materneltchik}, des mots qu’il faut conquérir et des {Minikeums}.
Critique : Tenir sa langue est porté par une langue imagée, aussi créative que l’esprit d’une fillette déracinée, tiraillée entre russe et français. Polina Panassenko arrive à Saint-Étienne après la chute de l’URSS, découvrant un pays et une culture, une langue et des traditions qui lui sont inconnus. Elle devient Pauline lorsque son père est naturalisé, lui offrant ainsi la nationalité française, et cherche, une fois adulte, à récupérer son prénom natal, comme elle voudrait retrouver quelque chose de perdu, un objet chéri et égaré à un endroit tangible, réel et non dans les méandres de l’administration française. La primo-romancière fait du cyrillique et de l’alphabet latin des êtres vivants, des silhouettes matérielles qu’elle plie et replie, identifie à des broquilles ou à des animaux reconnaissables. Elle les personnifie pour les apprivoiser, les frotte l’un contre l’autre pour mieux comprendre cette bataille qu’ils se sont livré dans sa tête après quelques temps à la materneltchik – comprendre à la maternelle.
Elle parsème son récit de termes russes, relate son enfance, ses déplacements géographiques et lexicaux, son parcours du combattant pour renouer avec son prénom. Entre l’école et la datcha estivale, entre l’appartement communautaire et l’immeuble stéphanois, entre la pop culture occidentale et les coutumes slaves, Polina joue et court après du sens, après son accent et son identité double.
Tenir sa langue est avant tout un récit tendre et plein d’une insolence touchante. Avec une dérision attachante, l’autrice revient ainsi sur son enfance et adopte les réflexions décalées d’une fillette d’ailleurs qui doit peu à peu faire son deuil des jeunes années et, avec elles, de la Russie des grands-parents, des superstitions, de la famille et de Léonid Outiossov.
Polina Panassenko - Tenir sa langue
L’Olivier
140 × 205 mm
192 pages
18,00 €
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Spitfire89 26 janvier 2025
Tenir sa langue - Polina Panassenko - critique du livre
Le premier roman de Polina Panassenko est un récit autobiographique intime, pudique et drôle. L’autrice aborde avec une efficacité la quête d’identité, les questions de l’exil ainsi que ce qui la conduira vers une action en justice pour se réapproprié un prénom d’origine avant sa francisation.
Une plume qui met en avant l’absurdité d’un processus, ponctuer de souvenir, récit attachant qui démontre que la double culture est possible.
Une intrigue dont les thèmes sont différents de Sous les strates mais j’ai une grosse préférence pour Tenir sa langue qui est plus percutant, plus vivant et l’autrice y met plus de coeur.
"Dehors, la petite fille teste, tente les mots, jettent ceux qui ne fonctionnent pas. A la maison, sa mère veille au grain. "Sentinelle de la langue, elle veille au poste-frontière. Pas de mélange. Elle traque les fugitifs français hébergés par mon russe. Ils passent dos courbé, tête dans les épaules, se glissent sous la barrière. Ils s’installent avec les russes, parfois même copulent, jusqu’à ce que ma mère les attrape. En général, ils se piègent eux-mêmes. Il suffit que je convoque un mot russe et qu’un français accoure en même temps que lui. Vu !""