Le 16 mai 2025
Un premier film maîtrisé qui dissèque avec effroi la mécanique du harcèlement scolaire avec trois jeunes interprètes principaux époustouflants.


- Réalisateur : Charlie Polinger
- Acteurs : Joel Edgerton, Elliott Heffernan, Everett Blunck
- Genre : Thriller, Film de sport
- Nationalité : Américain, Roumain
- Durée : 1h35mn
- Festival : Festival de Cannes 2025

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– Festival de Cannes 2025 : Sélection officielle, Un Certain Regard
Résumé : Dans un camp de water-polo pour garçons, un pré-adolescent de douze ans est marginalisé par ses camarades selon une tradition cruelle qui veut que l’un d’eux soit dit porteur d’une maladie qu’ils appellent « La Peste ». Alors que frontière entre le jeu et la réalité devient de plus en plus floue, il commence à craindre que la blague ne cache quelque chose de réel.
- © Festival de Cannes 2025
Critique : Il y a des films qui vous glacent le sang et dont l’effroi ne vous lâche plus d’un bout à l’autre. The Plague est de ceux-là. Il se passe lors d’un séjour d’apprentissage sportif qui réunit le temps d’un stage des jeunes qui pratiquent le water-polo. Les filles, elles, dans une autre classe, s’entraînent à la gymnastique aquatique. Ces compositions mono-sexuées des groupes pourraient faire hurler les opposants aux théories du genre, mais d’emblée, cette situation pose un cadre réactionnaire et implacable qui n’a pas bougé depuis que l’univers des sports de haut niveau existe. Trois personnages intéressent particulièrement le jeune et talentueux cinéaste Charlie Polinger : Jack qui se pose en leader du groupe ; le héros Ben récemment parti de Boston et souffrant de troubles de l’élocution ; et Eli qui, en plus de difficultés apparemment mentales ou cognitives, a le corps couvert d’eczéma. Ce dernier fait l’objet de moqueries et d’un rejet violent par l’ensemble du groupe à l’exception du protagoniste, du fait de sa différence physique et comportementale, et surtout du bruit que les jeunes sportifs font courir qu’il serait atteint par la peste.
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"La peste" donne le titre au film en anglais. Cette peste n’est pas seulement biologique, elle est surtout l’expression d’un harcèlement qui se répand très vite entre les enfants et dont les victimes ne peuvent plus sortir. Le réalisateur n’emprunte pas la question des réseaux sociaux pour décrire le problème, ce qui est très malin, car finalement dans l’enceinte fermée du club fermé, le fonctionnement de cette communication hostile et maltraitante procède des mêmes ressorts. On sait hélas les ravages que provoque le harcèlement scolaire en matière de dépression, de suicide ou de passages à l’acte agressifs graves. En l’occurrence, sans sombrer dans une leçon de psychologie de cuisine, ces plaques rouges qui colorent la peau d’Eli sont l’expression de sa douleur et sa détresse immenses, le conduisant à s’enfermer dans des comportements étranges, ritualisés, qui apparaissent comme des paravents efficaces contre sa solitude.
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The Plague alterne thriller et drame social. Dès l’entrée, grâce à une musique glaçante et la position de la caméra dans la piscine, l’apparition des corps des jeunes nageurs semble sortis de nulle part : ils sont semblables à des requins qui viendraient se défouler sur de pauvres victimes. La pression est permanente, et on perçoit notamment chez Jack les tics du pervers narcissique, qui monte le groupe contre la victime qu’il a désignée et fait en sorte de retourner la culpabilité sur ceux qu’il persécute. Son sourire narquois, sa position sur les tables de déjeuner, sa prestance augurent une force à manipuler et à rendre fous les individus qu’il a désignés comme mauvais. Mais les victimes hélas ne sont pas non plus étrangères à ce dispositif sournois et insidieux, elles-mêmes justifiant presque les comportements toxiques par manque de confiance en elles.
The Plague est un film intelligent et fort. Il emporte le spectateur jusque la fin dans la mécanique désastreuse du harcèlement scolaire. On regarde les victimes s’effondrer sans être capables du moindre geste de secours, à la façon du seul adulte du film confondant de lâcheté et de maladresse. Voilà une œuvre forte, dont on espère qu’elle sera remarquée par les jurys cannois d’un Certain Regard. Assurément, Charlie Polinger est un réalisateur à suivre.
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