Critique

CINÉMA

Désir(s) (Sehnsucht) - la critique contre

Vertiges de l’ennui

Le 2 octobre 2007

Le danger de filmer l’ennui, c’est d’ennuyer.

  • Claude Rieffel 16 février 2011
    Désir(s) (Sehnsucht) - la critique contre

    Valeska Grisebach a intégré dans le scénario de son deuxième long-métrage (après Mein Stern, 2001) des éléments d’une enquête réalisée à Berlin et alentours auprès de trentenaires interrogés sur leurs aspirations, leurs rêves, leurs désirs (leurs Sehnsüchte). Le tournage lui-même a duré plus d’un an (entre mars 2003 et mai 2004), inscrivant su la pellicule le passage du temps et les saisons.
    Ne cherchant pas à forcer l’empathie, mais avec la juste distance d’un regard de documentariste attentive et respectueuse, la cinéaste observe le travail du forgeron, une répétition de la chorale, des fêtes de familles ou un congrès de pompiers. Tous les personnages, fussent-ils à peine entraperçus, existent à l’écran et ont une histoire que nous ne connaitrons pas, comme cette vieille dame réfutant les paroles de sa petite-fille : Comme tu es belle grand-mère ; Plus maintenant.
    Marquée du sceau d’un romantisme qui est avant tout celui de son protagoniste incapable d’envisager le compromis, l’intrigue s’inscrit sans heurts dans ce contexte. Si la notion de destin est évoquée par les adolescents qui, dans la scène finale, racontent une version déformée de l’histoire sous forme de conte, elle est a peine effleurée par le récit du film lui-même qui conserve de bout en bout une ligne claire, loin du déterminisme naturaliste.
    Des audaces de mise en scène surprennent : la coupure brutale à la fin du long plan montrant le héros dansant seul sur la piste du restaurant et le raccord avec son réveil dans une chambre inconnue ; le suicide en deux temps, interrompu pour donner à manger au lapin et qu’on oublie presque en contemplant l’animal mastiquant son herbe avant d’être surpris par la coup de feu et le bond en arrière de l’homme vu de dos.
    On peut trouver un peu trop visible cette démonstration de maîtrise et trop froide la tenue exemplaire de l’ensemble. Il y a pourtant une vraie grâce dans ce film à la gravité dénuée de lourdeur. Les interprètes, non professionnels, y sont pour beaucoup. Andreas Müller, mécanicien dans la vraie vie, est impressionnant de présence corporelle et de précision des gestes. L’émotion distillée par le bien nommé Sehnsucht (le titre français est bien réducteur) émane en grande partie de son regard déterminé et de son sourire triste.

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