Questione di cuore (Question de coeur) - la critique

Méli-mélo à l’italienne à fort ancrage social qui intègre habilement des éléments de comédie pour mieux nous émouvoir.

L’argument : Angelo, jeune carrossier Romain, et son épouse Rossana attendent leur troisième enfant et vivent paisiblement dans le quartier du Pigneto à Rome.
Un soir, leur vie va croiser celle d’Alberto, scénariste en vogue, dans le lieu le plus inattendu.
Tous deux victimes d’un infarctus, Angelo et Alberto vont devenir amis en salle de réanimation, et à l’écoute du battement de leur cœurs, sceller leurs destins.

Notre avis : On avait un peu perdu de vue en France Francesca Archibugi (Dans la soirée, avec Bonnaire et Marcello Mastroianni en 1991). Pourtant, elle n’a cessé de tourner pour le cinéma (Lezioni di volo 2006) ou pour la télévision (Renzo e Lucia d’après Les fiancés -I promessi sposi de Manzoni). La revoici enfin avec ce Questione di cuore qui s’inscrit parfaitement dans la ligne de ces oeuvres précédentes, où les éléments de comédie sont habilement intégrés dans ce qu’il faut bien appeler par son nom : le mélodrame, sans que ce terme ait rien de péjoratif.

Quel méli-mélo en effet que cette histoire d’amitié qui naît au service des urgences de l’hôpital et finit presque en échange de rôles entre le carrossier père de famille et le scénariste en crise.
Bien sûr c’est aussi la rencontre de deux mondes, deux visages de l’Italie. D’un côté l’univers populaire et coloré du quartier de Pignetto où règne la débrouille à la limite de la légalité (les affaires du carrossier marchent si bien qu’il a pu s’acheter quatre ou cinq maisons !), de l’autre celui beaucoup plus superficiel des vedettes du spectacle (Stefania Sandrelli, Paolo Virzi, et d’autres font une apparition dans leur propre rôle).

Cet ancrage social tient visiblement très à coeur à la scénariste-réalisatrice ; le petit monde qui s’agite autours du garage est décrit avec justesse et chaleur. Certes la volonté de témoigner de la réalité de l’Italie contemporaine l’entraîne parfois à vouloir glisser trop de choses : l’ouvrier sénégalais qui manque de se faire tabasser par des loubards fait un peu pièce rapportée.
Les échanges entre le petit garçon et le scénariste, qui lui apprend qu’inventer des histoires c’est d’abord se poser des questions sur les gens qu’il observe dans la rue ou aux terrasses des cafés, sont drôles mais ne convainquent qu’à moitié.

C’est dans les scènes de l’hôpital, comme dans Il grande cocomero - La grande citrouille (1992) et dans la description des rapports familiaux que Francesca Archibugi est le plus à l’aise. La corde sensible est fortement sollicitée, et ce sont paradoxalement les scènes les plus drôles qui sont aussi les plus émouvantes. Les acteurs s’en donnent à coeur joie mais leur cabotinage est parfaitement en situation et fait mouche. Dans le rôle du bien nommé Angelo, le carrossier, Kim Rossi Stuart joue de ses yeux bleus, de son air d’éternel adolescent et d’un accent romain plus vrai que nature. Il éclipse presque Antonio Albanese, histrion irréfrénable mais au jeu plus contrôlé que d’habitude.
Questione di cuore réservera de grands moments d’émotion à qui ne craint pas de sortir le mouchoir.