Le 1er décembre 2025
Entre fantastique et pensée philosophique, cet envoûtant objet de cinéma sonne le glas d’un monde en pleine décadence pour ne pas dire en totale désuétude. Une première œuvre aussi fascinante que profondément originale.
- Réalisateur : Thibault Emin
- Acteurs : Lika Minamoto, Matthieu Sampeur, Édith Proust, Toni d’Antonio
- Genre : Fantastique, Épouvante-horreur, Romance
- Nationalité : Français
- Distributeur : UFO Distribution
- Durée : 1h42mn
- Date télé : 1er décembre 2025 22:26
- Chaîne : Ciné+ Frisson
- Date de sortie : 28 mai 2025
- Festival : Festival de Gérardmer 2024
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Résumé : Anx vient de rencontrer Cass quand l’épidémie éclate : partout, les individus fusionnent avec les choses. Cloîtré dans son appartement, le couple doit faire face à cette menace monstrueuse.
Critique : Décidément, la pandémie de Covid-19 aura imprimé pour longtemps l’imaginaire des artistes. Le drôle de virus qui se développe dans cette fiction n’a rien d’organique, ou du moins pas à première vue. Il semble en effet que la matière se développe et, à la façon d’un parasite, vient s’insérer dans le corps des êtres vivants pour peu à peu se substituer à l’univers. Else résonne ainsi comme une fin du monde macabre, traversée par un couple de jeunes gens, tout récemment formé, et qui tente de résister dans son appartement à cette très curieuse invasion.
Else offre quelque chose d’absolument nouveau dans le paysage cinématographique d’horreur. De loin, on peut penser à l’influence d’un film d’expérimentation comme Eraserhead de David Lynch (1977), qui à sa façon ouvrait des champs non explorés du cinéma d’épouvante. Il règne dans le monde de Thibault Emin une atmosphère poisseuse, très anxiogène, où la matière physique prend peu à peu le pouvoir sur la matière organique et se transforme en une sorte d’être hybride de chair et de choses. L’angoisse est évidente et se confirme dans l’usage de sons étouffés, de respirations sourdes, et d’une musique pénétrante. L’enfermement des personnages dans le confinement de l’appartement concourt aussi à renforcer le caractère oppressant de l’histoire qui est en soi difficilement racontable.

- Copyright UFO Distribution
Else est un premier film d’un jeune réalisateur formé à la FEMIS. On perçoit dans cette approche une véritable originalité, doublée d’un sens aigu de l’esthétique et de la photographie. Si on ressent que les moyens à disposition ne sont pas pléthoriques, ils sont largement compensés par une imagination débordante, un travail sur les décors impressionnant, et une détermination à détourner les codes traditionnels de la narration. Plus le monde s’éteint, et plus la couleur disparaît, au bénéfice d’un noir et blanc très suggestif. Le rétrécissement des espaces, la pesanteur de l’environnement concourent ainsi à perpétrer une vision du monde pessimiste et macabre.
Déjà, Else préfigure les signaux d’un film culte pour une génération assoiffée d’un renouvellement des formes au cinéma. Il s’agit pourtant de la toute première œuvre du réalisateur et le spectateur est bluffé par la maturité de la mise en scène qui se permet toutes les excentricités, sans jamais céder au maniérisme et à la prétention. Le cinéma d’horreur répète souvent les mêmes ficelles depuis des décennies. Ici, le propos se veut véritablement novateur, assorti d’un soin à générer des images fascinantes et troublantes. Les acteurs se prêtent largement aux fantaisies du réalisateur, feignant l’épouvante devant l’envahissement de cette matière tueuse dans les moindres recoins de l’appartement.

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Else évoque en filigrane la question complexe de l’euthanasie. À ce discours philosophique, s’ajoutent des influences du jeu vidéo d’épouvante, d’œuvres littéraires célèbres comme celle d’Orwell, et de films fantastiques ou d’horreur éprouvés. Il s’agit donc d’un long métrage très inspiré, très écrit, qui tente de rendre à l’écran les angoisses laissées par la pandémie de la Covid et la croissance des surveillances exercées par les pouvoirs publics dans l’environnement urbain. Thibault Emin incarne dans son récit tous les tourments d’une génération qui a subi le confinement à un âge où l’on pense à s’amuser, la transformation de la planète du fait des abus en matière écologique par les grandes puissances du monde, et la généralisation du numérique dans le quotidien.
Voilà donc un film furieusement intelligent qui ne laissera pas un seul spectateur indifférent. Au pire, certains crieront au délire psychédélique ; au mieux, on qualifiera Thibault Emin d’une révélation du septième art !
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