La loi c’est moi
Le 22 février 2015
Retrouvailles avec ce thriller politico-psychanalytico-satirique qui remporta un énorme succès en son temps et qui constitue une plongée dans le climat survolté de l’après 68.


- Réalisateur : Elio Petri
- Acteurs : Gian Maria Volonté, Salvo Randone, Florinda Bolkan, Orazio Orlando, Gianni Santuccio, Ugo Adinolfi
- Genre : Policier / Polar / Film noir, Politique
- Nationalité : Italien
- Editeur vidéo : Carlotta Films
- Durée : 1h49mn
- Titre original : Indagine su un cittadino al di sopra di ogni sospetto
- Date de sortie : 16 octobre 1970
- Festival : Festival de Cannes 1970

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Sortie en Italie : 9 février 1970
Retrouvailles avec ce thriller politico-psychanalytico-satirique qui remporta un énorme succès en son temps et qui constitue une plongée dans le climat survolté de l’après 68.
L’argument : En Italie, au début des années 70, le chef de la brigade criminelle est sur le point d’être promu au poste de directeur de la section politique. Persuadé que ses fonctions le placent au-dessus des lois, il égorge sa maîtresse, Augusta Terzi, au cours de leurs joutes amoureuses. Avec un sang-froid parfait, il met tout en œuvre pour prouver que personne n’aura l’intelligence, ni même l’audace, de le soupçonner et de troubler ainsi la bonne hiérarchie sociale. Il s’ingénie à semer des preuves accablantes, relançant l’enquête quand celle-ci s’égare...
Notre avis : Oscar du meilleur film étranger en 1971, gros succès dans son pays d’origine et ailleurs, Indagine su un cittadino al di sopra di ogni sospetto est emblématique d’un certain cinéma italien du début des années 70, mais le film d’Elio Petri garde néanmoins une place à part.
L’oeuvre se situe à la croisée de plusieurs genres qu’il mêle habilement. C’est d’abord un thriller psychanalytique à l’écriture sèche, très stylisé malgré son apparente pauvreté formelle, qui dresse le portrait d’un schizophrène, un policier à la psychologie infantile qui s’identifie totalement à la loi et au pouvoir de l’Etat dans une époque, l’après 68, où la contestation de l’ordre établi se généralise.
Cette schizophrénie étant générée par l’exercice-même du pouvoir le film est avant tout un apologue politique.
La satire est fortement ancrée dans la société italienne de l’époque, notamment au niveau de la typologie des personnages.
Mais la volonté d’abstraction, de généralisation, est évidente. Citant Kafka au générique de fin, Elio Petri et son co-scénariste Ugo Pirro s’inscrivent délibérément dans la lignée d’une littérature cultivant le sens de l’absurde et du grotesque. Et nous sommes en effet de bout en bout dans cette dimension, l’assassin finissant même par être forcé à avouer son innocence pour ne pas discréditer sa fonction. Le scénario développe assez brillamment cette dimension grotesque soulignée par le jeu outré de Gian Maria Volonté, qui utilise tous les registres de la caractérisation pour composer son personnage : mimiques, accent méridional, gestuelle appuyée.
Le film qui se réclame d’un cinéma de dénonciation destiné au grand public est d’une incontestable efficacité et fourmille de détails savoureux. Il faut avouer qu’Elio Petri n’hésite pas à enfoncer lourdement le clou pour que le spectateur comprenne bien le message et que certains aspects de l’oeuvre ont un peu vieilli.
Indagine su un cittadino al di sopra di ogni sospetto reste néanmoins un document étonnant, témoin d’une époque et d’un certain cinéma. Et la musique lancinante d’Ennio Morricone continue de produire son effet.
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Le DVD
Fidèle à son remarquable travail de réhabilitation du patrimoine cinématographique, Carlotta sort le 16 juin une belle édition Collector de ce film clé des années 70, assortie d’un impressionnant bouquet de compléments, ainsi qu’une édition simple.
Les suppléments
L’édition single inclut deux entretiens passionnants. Le premier, intitulé Regards croisées, confronte les souvenirs de tournages de Paola Pegoraro Petri, l’épouse du cinéaste, et de Marina Cicogna, la productrice. Elles s’expriment toutes les deux en français et savent faire revivre le tournage grâce à de savoureuses anecdotes.
Le deuxième, avec le critique de cinéma Fabio Ferzetti replace utilement le film dans le contexte politique de l’époque.
Mais on ne peut que très fortement recommander l’acquisition de l’édition collector qui comporte un deuxième disque indispensable. Outre un entretien très technique et captivant avec Ennio Morricone, collaborateur de Petri sur plusieurs films, et dont la partition joue un rôle essentiel dans le film, nous avons droit à un documentaire de 80 minutes réalisé en 2005 et qui dresse un portrait très attachant du cinéaste mort en 1982, à 53 ans.
De nombreux témoignages, des extraits de films judicieusement choisis et de précieux documents d’archives donnent une furieuse envie de redécouvrir l’oeuvre peu abondante (12 films) mais extrêmement variée de cette figure incontournable du cinéma italien des années 60 et 70.
L’édition collector comprend aussi un CD de la bande originale de Morricone qui ne nous a pas été fourni.
Image
Carlotta nous a tellement habitué à l’excellence qu’on sera légèrement déçu par une copie un peu terne, aux couleurs sans éclat mais sans défaut majeur par ailleurs. Il est vrai que la photo très surexposée est caractéristique du style de l’époque et qu’une restauration trop clinquante aurait sans doute dénaturé le film. Le report quand à lui est irréprochable.
Son
La bande son italienne mono est de bonne qualité, nette et sans bavure, mais si la musique d’Ennio Moricone passe sans problèmes, il faut monter sérieusement le volume pour bien entendre les dialogues et apprécier le travail des acteurs - doubleurs sur les divers accents italiens. La version française, au son très correct, est une curiosité datée mais on y perd toute la saveur de l’original.
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