Le 19 mai 2025
Thierry Klifa aime les (grands) acteurs et cela se voit ! Une comédie dramatique enlevée et jouissante sur le scandale revisité de l’affaire Liliane Bettencourt.


- Réalisateur : Thierry Klifa
- Acteurs : Isabelle Huppert, Marina Foïs, Mathieu Demy, André Marcon, Yannick Renier, Raphaël Personnaz, Laurent Lafitte, Micha Lescot, Paul Beaurepaire
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Français, Belge
- Distributeur : Haut et Court
- Durée : 2h02mn
- Date de sortie : 29 octobre 2025
- Festival : Festival de Cannes 2025

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– Festival de Cannes 2025 : Sélection officielle, Hors compétition
Résumé : La femme la plus riche du monde : sa beauté, son intelligence, son pouvoir. Un écrivain photographe : son ambition, son insolence, sa folie. Le coup de foudre qui les emporte. Une héritière méfiante qui se bat pour être aimée. Un majordome aux aguets qui en sait plus qu’il ne dit. Des secrets de famille. Des donations astronomiques. Une guerre où tous les coups sont permis.
- © Festival de Cannes 2025
Critique : Elle est riche Immensément riche. Et pour cause, elle est à la tête de la plus grande société de cosmétiques français. Elle s’appelle Marianne mais son prénom pourrait être celui d’Éliane. Thierry Klifa prend le risque de réécrire l’affaire Bettencourt avec François-Marie Banier qui a été accusé d’abuser de sa faiblesse pour lui sous-tirer des millions d’euros. On ne refera pas un procès ici, mais force est de constater que le long-métrage s’attache à mettre beaucoup de légèreté, de mouvement, pour raconter une histoire qui a défrayé la chronique et pose,de façon très précise, les limites complexes entre liberté de disposer de ses biens et nécessité d’être protégé, quand l’incapacité est constatée.
- Copyright Manuel MOUTIER
Thierry Klifa ne fabrique pas un film de procès. Il s’invite dans un univers surréaliste, exagérément artificiel, où il joue avec ravissement de l’ambivalence d’une femme qui est à la fois une très grande femme d’affaires, et en même temps se laisse séduire par un dandy homosexuel, hystérique, et surtout profondément manipulateur. La femme la plus riche du monde offre un portrait haut en couleurs d’une femme intelligente, drôle, mais aussi très seule, en dépit des milliards qui caractérisent sa situation patrimoniale. Finalement, le long-métrage fait la démonstration qu’il n’est jamais bon d’être trop riche, a fortiori quand on préside une entreprise cotée en Bourse et qui fait des jaloux. Il y a dans cet étalage de richesse quelque chose de délicieusement vulgaire, mais rien en comparaison de l’attitude grossière, perverse de son prétendant à un héritage.
Thierry Klifa aime les acteurs et il l’a déjà prouvé à maintes reprises. Il met en scène des bêtes de cinéma, à commencer la très grande Isabelle Huppert qui interprète Marianne. Il faut être une comédienne de génie, qui n’a plus rien à prouver, pour oser entrer dans les traits de cette personne vieillissante, sur le fil d’un état cognitif et intellectuel qui se dégrade. Elle surjoue la riche femme d’affaires, dans un univers hors sol, mais franchement vertigineux. Laurent Lafitte à son tour entre dans la peau de cet irrésistible escroc, qui s’agite dans tous les sens, met en scène sa désinvolture et sa cruauté dans un langage étourdissant. Le réalisateur met beaucoup de joie et légèreté dans ce roman de famille, et le spectateur ressent combien cet esprit solaire est communicatif.
- Copyright Manuel MOUTIER
Une mention spéciale revient aux accessoiristes, décorateurs, maquilleurs et costumiers. Il n’est pas évident de reconstituer des univers très aisés sans tomber dans la caricature. Les techniciens concourent indéniablement à la réussite de ce film qui est absolument bluffant d’un point de vue visuel. On pourrait être au théâtre, mais Thierry Klifa assume de faire un vrai film de cinéma, avec des plongées magnifiques sur la mer, et des demeures somptueuses. Et les interprètes semblent se régaler de cette ambiance où rien n’est sérieux et tout est sérieux à la fois, comme au cinéma.
Le film prévient dès le début. Il n’a pas vocation à éclairer une affaire judiciaire qui a fait couler suffisamment d’encre. Il faut donc le vivre comme une comédie aux accents tragiques, et si l’on parvient à se donner un avis sur la manipulation ou pas dont Marianne est victime, on pourra dire aussi que le film aura été utile. En effet, avec la population française qui vieillit, la dimension tutélaire est loin d’être anodine. Et c’est heureux d’aborder un tel sujet par des voies détournées, car la perte des capacités cognitives est loin d’être limitée à des classes sociales ou des catégories particulières. Thierry Klifa en fait un sujet joyeux, sans jamais se moquer des personnages et situations, à l’exception naturellement du photographe exubérant et insupportable. Un film qui rappelle par bien des aspects le meilleur du cinéma d’Ozon.
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