Le 9 juin 2025
Cette adaptation littéraire permet à Bo Widerberg d’aborder à nouveau le thème des rapports de classe, dans un récit à la fois limpide et elliptique. Un film classique dans le meilleur sens du terme.


- Réalisateur : Bo Widerberg
- Acteurs : Stellan Skarsgård, Pernilla August, Melinda Kinnaman, Stina Ekblad, Tomas von Brömssen, Ernst Günther, Reine Brynolfsson, Johan Widerberg
- Genre : Drame, Film pour ou sur la famille, Chronique familiale
- Nationalité : Suédois
- Distributeur : Malavida Films
- Durée : 2h10mn
- Reprise: 11 juin 2025
- Titre original : Ormens väg på hälleberget
- Date de sortie : 9 novembre 1988

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– Année de production : 1986
– Reprise en version restaurée : 11 juin 2025
Résumé : Un petit village suédois en 1860. Teah, une jeune femme dont le père vient de se suicider, fait le compte de son maigre patrimoine. Il ne lui reste qu’une cabane de bûcheron et quelques terres hypothéquées par le défunt à un vieux et riche marchand, Ol Karlsa. Ce dernier insiste pour que le fermage soit payé et Teah comprend vite qu’elle ne peut acquitter sa dette qu’en nature...
Critique : Le chemin du serpent est l’un des deux longs métrages que Bo Widerberg tourna dans les années 1980. Le cinéaste suédois, dont le nom fut longtemps occulté par celui de Bergman, fut l’un des meilleurs représentants de la Nouvelle vague européenne des années 60, avec des films tels qu’Ådalen ’31. Privilégiant une approche impressionniste et parfois biographique, il a souvent décrit le combat d’individus aux prises avec l’injustice d’une société qui les condamne à reproduire un statut précaire. D’une facture en apparence plus classique, Le chemin du serpent s’inscrit bien dans la continuité de l’œuvre du réalisateur, même si l’on peine toutefois à reconnaître rapidement sa griffe visuelle : les expérimentations esthétiques d’Amour 65 semblent ici le souvenir d’une période révolue, ce qui n’enlève rien à la beauté du film. Il s’agit de l’adaptation d’un roman foisonnant de Torngy Lindgren, dont Widerberg a gardé les aspects mélodramatiques, mais en les épurant, à la fois par le jeu des acteurs et le recours à des ellipses.
- © Malavida
Dans un village suédois des années 1860, Teah, une jeune veuve dont la maison est hypothéquée, subit le chantage financier d’Orsa, un voisin négociant. Elle devra lui payer tous les mois le fermage qui lui est dû, à moins qu’elle ne consente à un « arrangement » sous forme de droit de cuissage. Les décennies passent et Karl-Orsa, le fils du négociant, reprend les affaires à la mort de son père, ainsi que l’« arrangement », qu’il renouvellera avec la fille puis la belle-fille de Teah. La narration a son lot de moments glauques, parfois répétitifs (mais jamais redondants) : chantages sexuels permanents, cuisses ouvertes pour un morceau de pain, situations quasi incestueuses, alcoolisme récurrent, pendaisons… Mais Widerberg ne force pas sur la corde sentimentale et naturaliste. Il parvient à montrer des situations oppressantes dans une approche épurée, jouant admirablement de l’utilisation de décors formant un quasi-huis clos, mais sans dimension ouvertement théâtrale. Le film fait ici songer à d’autres métrages ayant abordé un sujet presque similaire, de Tasio à Vermiglio en passant par L’arbre aux sabots.
- © Malavida
On retrouve par ailleurs le thème de la cellule familiale pauvre que le cinéaste avait traité dans ses deux premiers films, Le péché suédois et Le quartier du corbeau, mais avec ici une perspective davantage historique, qui était aussi celle déployée dans Elvira Madigan et Joe Hill. L’œuvre fut plutôt bien accueillie à sa sortie, et Jacques Valot pouvait écrire dans « La saison cinématographique 1988, La Revue du Cinéma » : « Tout l’art du cinéaste est dans la violence feutrée, insidieuse, banalisée, qu’il instille dans cette sombre parabole sur le pouvoir, servie par des comédiens superbes d’intensité ». Il faut ici souligner le jeu profond de Stina Ekblad qui la même année avait également brillé dans Amorosa de Mai Zetterling. À ses côtés, Stellan Skarsgård (peu connu chez nous à l’époque) est prodigieux en créancier ignoble. Le chemin du serpent trouva un écho limité à sa sortie. L’occasion de le (re) découvrir est donnée avec la rétrospective Widerberg proposé par Malavida le 11 juin 2025.
- © Malavida
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