Le 9 septembre 2025
Si le film décortique assez habilement les moteurs d’une famille japonaise toxique, le propos se délaye dans une série de parenthèses pas toujours heureuses, qui peuvent laisser le spectateur perplexe.
- Réalisateur : Chie Hayakawa
- Acteurs : Lily Franky, Ayumu Nakajima, Yūmi Kawai, Hikari Ishida
- Genre : Drame, Film pour ou sur la famille
- Nationalité : Français, Japonais
- Distributeur : Eurozoom
- Durée : 1h54mn
- Reprise: 10 septembre 2025
- Festival : Festival de Cannes 2025
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– Festival de Cannes 2025 : Sélection officielle, En compétition
Résumé : Au cœur de l’été 1987 à Tokyo, alors que le Japon est au sommet de sa croissance économique, une jeune fille excentrique et sensible de onze ans doit faire face au cancer de son père en phase terminale et au stress de sa mère déjà surchargée de travail. Chacun d’eux recherche désespérément des interactions humaines.

- © Festival de Cannes 2025
Critique : De Renoir, on ne verra que des reproductions dans l’hôpital où le père de Fuki est en train de mourir d’un cancer de l’estomac. La réalisatrice, Chie Hayakawa, explique d’ailleurs que le peintre impressionniste est très apprécié au Japon et que nombre de ses toiles sont accrochées sur les murs familiaux, en écho à l’attrait des Japonais pour le modèle européen. Il n’est donc pas question d’attendre dans ce long, trop long-métrage, un biopic sur l’artiste, vu à travers le prisme d’une cinéaste asiatique.

- © 2025 Goodfellas / Eurozoom. Tous droits réservés.
Renoir s’intéresse à une famille en pleine décomposition. La fille unique, Fuki, peu expressive, souffre manifestement d’une grande solitude qu’elle compense en écoutant des annonces téléphoniques de petites rencontres ou en s’adonnant à des pratiques ésotériques assez étranges. Son père est mourant et son épouse a décidé de l’abandonner dans un hôpital. L’homme tente de résister à la maladie, continue de travailler mais le mal continue inexorablement sa dangereuse dévastation du corps, pendant que son épouse s’éprend d’un homme venu au secours du malade. Voilà dans les grandes lignes le synopsis de cette histoire qui dure presque deux heures, dans un rythme pour le moins extrêmement lent. Pour autant, il y a une véritable inspiration dans la description tout en malentendus et en implicites de cette famille, au bord de l’implosion. Les choses ne se disent pas, et chacun traverse, dans un secret amer, la décomposition de son existence.
Renoir fait partie, dans la compétition officielle cannoise 2025, des films les plus ambivalents. Incontestablement, le scénario est très dense, très abouti, prenant à témoin une fillette qui fait la démonstration de l’état d’abandon dans lequel elle est éduquée. Elle se construit toute seule, jusqu’à prendre des risques inconsidérés avec des adultes. Elle est fascinée par les émissions télévisées de tueurs en série, comme si elle-même pressentait que, dans sa déroute, elle pouvait approcher ce type de danger. C’est une petite fille qui ne joue pas (elle fréquente vaguement une copine) et ne reçoit que rarement de gestes d’affection de la part de ses parents. En gros, cette famille représente la représentation inverse de la famille japonaise, souvent perçue comme très unie et focalisée sur le désir des enfants.

- © 2025 Goodfellas / Eurozoom. Tous droits réservés.
En prenant le contre-pied de l’archétype de la famille japonaise, Chie Hayakawa offre un spectacle d’une profonde désespérance. Mais l’écueil du film demeure dans son formalisme trop froid, trop distancié, qui ne permet pas au spectateur d’éprouver la moindre empathie à l’égard des membres de la famille. Certes, le couple ne s’aime plus, mais à l’approche d’une mort certaine, on pouvait attendre plus de nuances dans la manière dont les époux se défont l’un de l’autre. La question de l’argent est subtilement envisagée, d’autant que la mère compte refaire sa vie avec la fortune que son mari mourant aura laissée. Mais ce dernier, pourtant brillant homme d’affaires, se laisse berner par un traitement à un coût exorbitant et sans aucune efficacité. Le plus complexe demeure de comprendre la jeune fille. La réalisatrice multiplie les scènes décalées autour d’elle, dont on ne sait jamais vraiment s’il s’agit de rêves ou d’une réalité qu’elle traverse.
Renoir ne démérite absolument pas dans sa structure narrative générale et la maîtrise de l’écriture. Maintenant, se pose vraiment pour ce film la question difficile de sa réception par un public occidental qui ne maîtrise pas tous les codes de la fiction japonaise. Ainsi, le risque pour le spectateur est de se perdre dans le labyrinthe insondable de la pensée de Fuki, qui jusqu’au bout du film, demeure inaccessible. Le format aurait mérité d’être condensé, le risque étant de faire peser sur le long métrage une certaine complaisance. Mais quelques jolis moments surgissent, comme des opportunités pour le spectateur de persévérer dans cette incursion triste dans la psychologie d’une enfant fragile.
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