Le 16 mai 2025
Inclassable et captivant, séduisant mais déroutant, ce long métrage d’Óliver Laxe n’est en rien consensuel et dispose de réelles qualités, même s’il pourra légitimement mettre mal à l’aise.


- Réalisateur : Óliver Laxe
- Acteurs : Sergi López, Bruno Núñez, Jade Oukid
- Genre : Drame, Road movie, Survival, Dystopie
- Nationalité : Espagnol, Français
- Distributeur : Pyramide Distribution
- Durée : 2h00mn
- Date de sortie : 10 septembre 2025
- Festival : Festival de Cannes 2025

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– Festival de Cannes 2025 : Sélection officielle, En compétition
– Festival de Cannes 2025 : Prix du Jury
Résumé : Au Maroc, dans le massif désertique du Saghro, Louis, accompagné de son fils Stéphane, recherche sa fille aînée Marina, qui a disparu. Ils rallient un groupe hétéroclite de ravers lancé à la recherche d’une énième fête aux confins du continent africain. Ils embarquent ainsi pour une odyssée ardente dans les profondeurs du désert saharien, un miroir de sable qui confronte les personnages à leurs propres limites.
- © Festival de Cannes 2025
Critique : Coproduction franco-espagnole, Sirāt est bien dans la lignée du cinéma d’Óliver Laxe, qui avait été révélé à la Quinzaine des Cinéastes 2010 avec le documentaire Vous êtes tous des capitaines, tourné avec des enfants, et jouant sur les mises en abyme. Il avait confirmé son style aride et sans concessions avec Mimosas, la voie de l’Atlas (Semaine de la Critique 2016), dépouillé en envoûtant ; et Viendra le feu (Prix du Jury Un Certain Regard 2019), qui décrivait les secrets brumeux et les codes lumineux de la Galice. Situé à une période indéterminée (mais sans doute dans un futur proche), le scénario confirme le goût du cinéaste pour les symboles, qu’il greffe ici à une incursion implicite au cinéma de genre (dystopie, action), revisité toutefois dans une vision auteuriste que d’aucuns jugeront radicale. La trame métaphorique est inspirée du pont Sirāt qui, dans la culture islamique, sépare l’enfer du paradis où l’âme se confronte à sa propre vérité. Luis, un père de famille (Sergi López), se rend dans le désert marocain, accompagné de son fils de douze ans. Il est à la recherche de sa fille aînée, Marina, qui a disparu depuis quelques mois afin de vivre l’expérience de raves.
- © 2025 Pyramide Distribution. Tous droits réservés.
Luis décide de suivre une bande de marginaux désireux de rouler vers le sud du Maroc, où se trouve peut-être la jeune femme. Mais la dureté des conditions de voyage et des éléments naturels, ainsi que la propagation d’une guerre peut-être mondiale vont rendre cette traversée difficile, pour ne pas dire cauchemardesque. Sirāt est le genre de films qui ne créera pas l’unanimité, et dont les défenseurs eux-mêmes pourront ressentir un malaise compréhensif, de par la violence et la tension oppressante de la seconde partie, mais aussi le traumatisme (pour les personnages comme le spectateur) d’une rupture narrative presque aussi surprenante que dans Psychose. La démarche d’Óliver Laxe est vraiment singulière, par son filmage majestueux de paysages et d’éléments indomptables, avec une lumière presque biblique ; par sa narration à la fois minimaliste et grandiloquente ; par ses symboles suggérés sur le danger apocalyptique.
- © Quim Vives / 2025 Pyramide Distribution. Tous droits réservés.
En même temps, le long métrage croule de références évidentes pour le cinéphile, de Profession : reporter (le jeu de pistes introspectif) aux Mad Max (les camions, les pénuries d’essence), en passant par Délivrance (l’escapade qui part en vrille), Funny Games (la famille décimée), Freaks (les exclus estropiés), voire Mektoub My Love : Intermezzo, pour la musique techno à fond… Ces influences, peut-être inconscientes, n’occultent en rien les qualités du film d’Óliver Laxe qui est fidèle à sa démarche tout en se renouvelant. La présence de Sirāt en compétition officielle à Cannes risque d’ailleurs d’élargir son audience, y compris parmi les amateurs d’un cinéma davantage grand public. Et l’on pourrait même envisager le statut de future œuvre culte pour ce film authentiquement personnel. En même temps, le métrage risque d’être rejeté pour son ambiance délibérément glauque et oppressante, et de tomber dans un oubli similaire à celui que connut le dérangeant Twentyne Palms de Dumont. Souhaitant que la première hypothèse soit la bonne pour un cinéaste auquel on ne peut en tout cas pas reprocher de se laisser glisser dans le confort des conventions.
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