Drame au soleil
Le 22 mai 2012
En tournant sur les terres de Pagnol ce drame en plein soleil souvent considéré comme un précurseur du néo-réalisme Renoir évite le folklore méridional et fait déboucher le documentaire sur la tragédie sans recourir à la dramaturgie forcée.


- Réalisateur : Jean Renoir
- Acteurs : Édouard Delmont, Charles Blavette, Celia Montalván, Jenny Hélia , Andrex, Max Dalban
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Durée : 1h25mn
- Date de sortie : 22 février 1935

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Tournage : été 1934 à Martigues et Châteauneuf-les-Martigues (Bouches-du-Rhône)
New York Film Critics Circle Awards 1935 : Meilleur film étranger
En tournant sur les terres de Pagnol ce drame en plein soleil souvent considéré comme un précurseur du néo-réalisme Renoir évite le folklore méridional et fait déboucher le documentaire sur la tragédie sans recourir à la dramaturgie forcée.
L’argument :Toni, immigré italien, trouve du travail dans une carrière près de Martigues et entame une liaison avec Marie, sa logeuse. Il tombe amoureux de Josépha, une espagnole dont l’oncle possède une petite propriété terrienne. Mais la jeune femme est séduite par Albert, le contremaître de Toni, et l’épouse.
Albert se désintéresse vite de sa femme et de son enfant, se révélant brutal et intéressé surtout par l’argent de l’oncle. Lorsque celui-ci décède, Gaby, l’employé de la ferme, convainc Josépha de s’emparer de l’argent et de partir avec lui en Amérique du Sud.
Mais elle est surprise par Albert qu’elle tue d’un coup de révolver lorsqu’il la menace. Toni, mis au courant de tout, décide de maquiller le meurtre en suicide mais est surpris par un gendarme au moment où il dépose le cadavre dans une pinède.
Pour épargner la prison à celle qu’il aime, Toni s’accuse du meurtre. Il échappe au gendarme pour faire ses adieux à Josépha mais il est abattu par un garde forestier trop zélé.
Josépha se dénonce à la police.
Notre avis : Essentiellement tourné en extérieurs dans les environs de Martigues durant l’été 1934, Toni a été produit par Marcel Pagnol. Plusieurs des interprètes principaux du film ont apparu, ou apparaîtront par la suite, dans ceux de l’écrivain-cinéaste provençal (Blavette et Delmont, présents l’année précédente dans l’admirable Joffroi ; Andrex, le mauvais garçon séducteur d’Angèle).
Pourtant, malgré l’accent et le soleil du midi, le film de Renoir ne sacrifie guère au goût de la couleur locale et du (génial) théâtre pagnolien.
- Charles Blavette et Celia Montalván dans Toni (Renoir 1934)
S’inspirant d’un fait divers Renoir évite le crescendo mélodramatique et adopte un style sec, sans emphase malgré la splendeur de la photo (signée Claude Renoir) et l’indéniable grandeur tragique qui envahit comme par mégarde ce qui ressemble à un documentaire.
Cette recherche de l’authenticité et ce refus de la dramatisation forcée éclatent par exemple dans la séquence où les ouvriers piémontais chantent autours du feu ou dans celle de la tentative de suicide de Marie (Jenny Hélia) : après qu’on ait emporté la jeune femme sauvée de la noyade la caméra s’attarde un moment encore, laissant entrer dans le champ des badauds qui échangent des commentaires ou un homme qui ouvre son parapluie.
- Charles Blavette, Jenny Hélia et Edouard Delmont dans Toni (Renoir 1934)
Formidable directeur d’acteurs, Renoir n’autorise jamais ses interprètes, professionnels ou non, à recourir aux ficelles du métier et laisse vivre ses personnages sans les enfermer dans des typologies toutes faites : la coquetterie et l’inconséquence de Josépha ne font pas d’elle une femme fatale et même l’ignoble Albert est plus veule que méchant.
Quant à la virtuosité, souvent époustouflante, des mouvements de caméra, elle n’est pas une fin en soi mais cherche, et parvient, à créer une sensation de précarité atmosphérique, un fort sentiment d’accidentel qui culmine avec la scène vertigineuse où Toni, courant sur le pont métallique, est abattu bêtement par un garde chasse qui semble d’abord le viser par jeu, désireux avant tout de démontrer ses qualités de tireur.
Cette séquence annonce celle de la mort, tout aussi idiote, de l’aviateur dans La règle du jeu.
- Toni (Renoir 1934)
On a souvent vu dans Toni le précurseur du néoréalisme. Visconti, qui travailla sur le tournage comme assistant, a toujours reconnu sa dette envers son maître et se souviendra de la leçon renoirienne dans son sublime Ossessione (1942).
- Toni (Renoir 1934)
- Toni (Renoir 1934)
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