Le 14 août 2024
Marcel Pagnol épure son art avec cette adaptation de Giono, utilisant avec talent le cadre naturel des décors provençaux dans une narration qui tente de trancher avec le pittoresque comique et mélodramatique de ses autres films.
- Réalisateur : Marcel Pagnol
- Acteurs : Marguerite Moreno, Gabriel Gabrio, Fernandel, Henri Rollan, Édouard Delmont, Charles Blavette, Orane Demazis, Robert Le Vigan, Henri Poupon, Robert Vattier, Paul Dullac, Odette Roger, Milly Mathis
- Genre : Drame, Noir et blanc
- Nationalité : Français
- Distributeur : Carlotta Films, Les Films Marcel Pagnol
- Durée : 2h17mn
- Date télé : 25 novembre 2024 22:43
- Chaîne : Ciné+ Classic
- Reprise: 24 juillet 2024
- Date de sortie : 29 octobre 1937
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– Reprise en version restaurée : 24 juillet 2024
Résumé : Dans un village abandonné, seul habite encore Panturle. Tout autour, la terre sèche ne produit plus rien. Un rémouleur, Gédémus, arrive accompagné d’une jeune femme, Arsule, qu’il emploie pour tirer sa charrette. L’amour qui va naître entre Panturle et Arsule transformera la destinée même du vieux village.
Critique : Après le succès de la Trilogie marseillaise, Marcel Pagnol était désormais bien implanté dans le cinéma français. Produit par sa société Les Films Marcel Pagnol, Regain est l’adaptation, par le réalisateur, d’un roman éponyme de Jean Giono. Ce n’était pas la première fois que Pagnol s’était intéressé à l’univers de l’écrivain, puisqu’il avait signé Joffroi (1933) et Angèle (1934), tirées de son œuvre. Après Regain, Pagnol adaptera également un passage de Jean le Bleu de Giono, qui deviendra La femme du boulanger (1938). Pourtant, Giono n’était pas satisfait du film. En fait, il reprochait à Pagnol d’avoir acheté les droits cinématographiques d’ouvrages édités par la NRF sans l’avoir consulté, et l’écrivain aurait souhaité être explicitement mentionné comme coscénariste de ces films…Tourné en même temps que Le Schpountz, Regain joue la carte de la noirceur et de la sobriété, malgré quelques passages comiques apportés par le personnage de Fernandel, encore qu’avec ce rôle de Gédémus, rémouleur lâche et profiteur, l’acteur était particulièrement utilisé à contre-emploi.
- Fernandel, Orane Demazis
- © Carlotta Films
Le thème de la mort hante toute la narration, de celle du mari de « la Mamèche » (Marguerite Moreno), tué dans l’éboulement du puits qu’il creusait ; à celle à venir, du vieux forgeron Gaubert (Édouard Delmont), parti terminer ses jours chez son fils (Charles Blavette) et sa belle-fille (Milly Mathis). C’est surtout la menace de la mort d’une commune qui est à l’horizon, puisqu’Aubignane, village isolé perché sur un plateau de Haute-Provence (et reconstitué pour les besoins du film) ne compte plus que deux habitants : après le départ de Gaubert, il ne reste que « la Manèche » et le paysan Panturle (Gabriel Gabrio). Le thème de la désertification rurale, dont on parlait peu à l’époque, n’est pas le moindre intérêt de ce récit qui croise les mésaventures des derniers villageois avec le parcours du rémouleur qui a recueilli Arsule (Orane Demazis), une pauvre fille qui lui sert de boniche. Le couple qu’ils forment n’est d’ailleurs pas sans évoquer Zampano et Gelsomina dans La strada (Fellini avait-il vu Regain ?) Toujours est-il que Gédémus et Arsule vont croiser Panturle sur leur route…
- Orane Demazis, Gabriel Gabrio
- © Carlotta Films
L’accusation de faire du « théâtre en conserve », subie par Pagnol depuis le début de sa carrière cinématographique, n’est ici définitivement plus recevable. Certes, les dialogues sont abondants, y compris pour les séquences avec personnages secondaires, comme le fidèle ami L’Amoureux (Henri Poupon) et sa femme (Odette Roger), ou le négociant intraitable (Paul Dullac). Mais c’est déjà un choix de mise en scène, les plans fixes et plans séquences accompagnant ces échanges annonçant les démarches de cinéastes aussi divers que Mankiewicz, Rohmer ou Eustache. D’autre part, l’utilisation des décors extérieurs (les alentours d’Aubagne, Allauch et autres lieux des Bouches-du-Rhône) donne au métrage une véritable dimension néoréaliste, avec une vision sèche qui sera aussi celle, un peu plus tard, d’un Jean Grémillon. En même temps, c’est cette austérité inhérente au roman de Giono qui enrichit la palette de Pagnol, qui reste toutefois fidèle à sa description des tourments sentimentaux et des recompositions familiales. Signalons que Regain avait fait un malheur auprès de la presse américaine, figurant en 1939 dans le « Top Foreign Films » du National Board of Review et lauréat du meilleur film étranger pour le « New York Film Critics Circle Awards ». En 2024, Carlotta en propose une version restaurée distribuée en salle, dans le cadre d’une rétrospective en dix films.
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