Le 13 novembre 2025
Des larges cadres aux jeux de lumière tout en contrastes, en passant par les performances survoltées des acteurs, del Toro semble presque appeler de loin ces salles obscures dont il s’est exclu. Une réussite.
- Réalisateur : Guillermo del Toro
- Acteurs : Nicolaj Lie Kaas, Charles Dance, Oscar Isaac, David Bradley, Christoph Waltz, Lars Mikkelsen, Mia Goth, Ralph Ineson , Jacob Elordi, Burn Gorman , Joachim Fjelstrup, Christian Convery, Felix Kammerer
- Genre : Drame, Science-fiction, Épouvante-horreur, Remake
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Netflix
- Durée : 2h30mn
- VOD : Netflix
- Date de sortie : 7 novembre 2025
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– En VOD sur Netflix à partir du 7 novembre 2025
Résumé : Le réalisateur oscarisé Guillermo del Toro adapte le roman classique de Mary Shelley sur Victor Frankenstein, un scientifique brillant mais égocentrique qui donne vie à une créature lors d’une expérience monstrueuse, menant finalement à la perte du créateur comme de sa tragique création.
Critique : Ce 7 novembre 2025, Guillermo del Toro a enfin été en mesure de nous présenter son obsession favorite. Longtemps attendu autant par son auteur que par son public, Frankenstein élabore, à travers une troupe de comédiens habités par leurs rôles et une direction artistique fastueuse, une approche à la fois fidèle au roman de Shelley et un attachement à des thématiques chères au réalisateur mexicain. Malheureusement cantonné aux petits écrans par Netflix, le film parvient à garder un grandiose tel qu’on regrette son absence dans les salles françaises. Des larges cadres aux jeux de lumière tout en contrastes, en passant par les performances survoltées des acteurs, del Toro semble presque appeler de loin ces salles obscures dont il s’est exclu. De la plateforme de streaming, on remarque quelques éclairages, notamment en contre-jours, nuisant à la lisibilité et l’esthétique des plans comme on en retrouve beaucoup dans les productions télévisuelles récentes. Elordi, dans ce rôle de Créature mêlant tendresse et physicalité brutale, est la véritable révélation du film. Il lui confère tout son tragique, sa mélancolie mais aussi un cœur battant et rempli d’espoir. La Créature de del Toro est, contrairement à son homologue de papier, un être ayant droit à une seconde chance, un nouveau départ marqué par le pardon et une volonté de vivre retrouvée.

- Oscar Isaac
- © 2025 Netflix. Tous droits réservés.
Oscar Isaac, quant à lui, incarne avec fièvre le scientifique se rêvant démiurge dans une interprétation du personnage où son ambition créatrice n’a d’égale que sa lâcheté : il échoue malgré sa réussite. Le docteur est hanté, poursuivi par la couleur rouge, symbolisant sa défunte mère, la vie qu’elle incarnait et qu’il essaye constamment de maîtriser, mais aussi le sang dont il est couvert à la mort de sa mère et lors de sa propre fin. On peut regretter un espace trop étroit laissé à Mia Goth dont le personnage excentrique, à nouveau assez éloigné de celui du roman, éclaire la figure de la créature d’une lueur plus sensuelle, presque romantique. On retrouve ici un motif si cher à del Toro : la jeune femme tombant sous le charme d’un être monstrueux, redéfinissant les codes de la désirabilité. L’actrice se mue d’ailleurs au cours du film, jouant la mère de Victor et la fiancée de son frère qu’il désire en vain, dans un fantasme infantile de retour au corps maternel. Le réalisateur se positionne, comme à son habitude, du côté du monstre qui est bien plus humain que tous ceux qui l’entourent, habité par une pureté presque enfantine que ces interlocuteurs semblent avoir perdue. Il nous offre ainsi un mélodrame de science-fiction touchant par une sincérité et une douceur dont il demeure l’un des maîtres. Là où on lui a imputé une presque trop grande fidélité à l’œuvre de Mary Shelley, del Toro plie le roman à sa guise. Il change l’époque, supprime plus de la moitié des personnages, en mélange d’autres, crée de toute pièce Harlander (le mécène de Victor Frankenstein incarné par Christoph Waltz) et change radicalement la caractérisation et l’histoire d’Elizabeth. Victor est également dépeint de manière plus sombre, quasi dénué de remords, détruisant tout ce qu’il touche.

- Jacob Elordi
- © 2025 Netflix. Tous droits réservés.
Ce que le réalisateur mexicain reprend de la romancière anglais, c’est la narration en plusieurs points de vue, ce qui donne au film sa profondeur thématique, ainsi que l’aspect de la Créature, semblable à un amas de chair éparses et désordonnées. Son monstre à lui n’en est cependant pas vraiment un : il est bien moins criminel, bien plus victime que celui du roman, il n’est pas une aberration dont le destin est de disparaître. Dans cette approche sélectivement fidèle à l’œuvre romanesque dans une énième adaptation d’un monstre gothique icône de la culture populaire, del Toro se rapproche plus du travail de Coppola sur son Dracula, assumant un retour aux origines mêlés à des ajouts prenant beaucoup de places et marquant une volonté de s’approprier ces créatures aux héritages foisonnants. En somme, del Toro ne s’affiche pas comme un adaptateur fétichiste du roman original mais comme un fin connaisseur de Shelley, soulignant ses références à John Milton où son grand intérêt pour les sciences naturelles. Il s’éloigne du mythe populaire de la créature à la peau verte pour se rapprocher de certains aspects du livre mais aussi pour faire sa propre interprétation, vectrice de ses passions et convictions dans un film émouvant et spectaculaire. Là où l’on peut fustiger Netflix qui nous empêche de voir le film en salle, on peut lui reconnaître le moindre mérite d’avoir produit ce projet de cœur du réalisateur, qu’il tenait à faire naître depuis presque vingt ans.
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