Mon frère ce héros
Le 28 décembre 2009
Ecrit par Coppola lui-même, Tetro est un diamant noir sincère et émouvant malgré une fin un peu toc. Avec un Vincent Gallo retrouvé.


- Réalisateur : Francis Ford Coppola
- Acteurs : Carmen Maura, Rodrigo De La Serna, Vincent Gallo, Maribel Verdu, Alden Ehrenreich
- Genre : Drame
- Nationalité : Américain, Argentin
- Date de sortie : 23 décembre 2009
- Plus d'informations : Le site officiel du film
- Festival : Festival de Cannes 2009

Durée : 2h07mn
Ecrit par Coppola lui-même, Tetro est un diamant noir sincère et émouvant malgré une fin un peu toc. Avec un Vincent Gallo retrouvé.
L’argument : Tetro est un homme sans passé. Il y a dix ans, il a rompu tout lien avec sa famille pour s’exiler en Argentine. A l’aube de ses 18 ans, Bennie, son frère cadet, part le retrouver à Buenos Aires. Entre les deux frères, l’ombre d’un père despotique, illustre chef d’orchestre, continue de planer et de les opposer.
Mais, Bennie veut comprendre. A tout prix. Quitte à rouvrir certaines blessures et à faire remonter à la surface des secrets de famille jusqu’ici bien enfouis.
Notre avis : Cela fait bien longtemps que Francis Ford Coppola n’a plus rien à prouver. Sauf peut-être une chose : qu’il sait encore écrire une histoire. 35 ans après Conversation secrète, voici donc enfin un scénario original signé par le maestro. Du coup, lors de la présentation du film à Cannes, beaucoup se sont empressés de déclarer qu’il s’agissait là de son œuvre la plus personnelle. Certes, à travers Tetro, Coppola parle de son génie de père, de sa fascination pour son grand frère et de la famille en souffrance. Mais ce sont des thèmes qui innervent toute sa filmographie et l’on peut aisément mettre en relation ce dernier métrage avec Rusty James par exemple, d’autant que Matt Dillon devait initialement interpréter le rôle de Vincent Gallo.
- © Memento Films Distribution
Non, ce qu’il y a de vraiment personnel dans ce nouvel opus, c’est le plaisir simple et honnête que prend le cinéaste à faire ce qu’il veut. Par exemple, il choisit de tourner en Argentine parce qu’il a récemment craqué pour ce pays, et il délaisse les mouvements de caméra pour ne réaliser quasiment que des plans fixes. Un choix par ailleurs fort judicieux puisqu’il nous offre une succession de tableaux saisissants plongés dans un sublime noir et blanc. Coppola, avec un sens du cadre photographique hallucinant, compose des plans d’une stupéfiante beauté et les enfile comme des perles sur un fil narratif mince mais solide. Le tout avec un naturel désarmant et une simplicité loin de toute velléité ostentatoire, comme s’il lui suffisait de claquer des doigts pour réaliser ces petits miracles.
- © Memento Films Distribution
Ainsi, le point fort de Tetro réside dans le fait que tous ces plans pensés et travaillés nous donnent une impression paradoxalement naturaliste. Grâce aux nombreux extérieurs peut-être, grâce à des personnages hauts en couleurs, dignes d’Almodovar, sans doute. Seul élément symbolique, mais traité avec une classe folle : le jeu sur le noir et blanc, l’ombre et la lumière. L’affrontement entre le ténébreux Tetro (quel bonheur de revoir Vincent Gallo !) et le solaire Bennie (Alden Ehrenreich, étrange croisement entre Di Caprio et Michael Pitt). La lumière, Tetro la fuit désespérément et préfère la renvoyer (il est éclairagiste dans un café-théâtre minable) car elle lui rappelle la vérité de son passé. Bennie, lui, est assoiffé de vérité au contraire et s’approche dangereusement de cette lumière au fur et à mesure de son enquête sur son frère, à l’instar du papillon manquant de se brûler les ailes au contact d’une ampoule. Ce jeu et cette opposition ne sont là que pour souligner délicatement les sentiments profonds exprimés par les personnages. Coppola frôle la perfection.
Malheureusement lorsqu’il décide in fine, de manière pourtant astucieuse, de plonger ses personnages dans le factice (la remise des prix et l’enterrement du père) pour faire éclater la terrible vérité, le symbolisme prend alors le pas sur les rapports humains et le film plonge dans un surréalisme pompeux et pompier. Le papillon se fait pachyderme. La sincérité laisse place à un savoir-faire froid. Dommage que cette fin ternisse quelque peu une œuvre qui reste malgré tout la meilleure de son auteur depuis fort longtemps.
- © Memento Films Distribution
Galerie photos
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Norman06 23 décembre 2009
Tetro - la critique
Coppola, dont c’est ici le grand retour, transcende un matériau de base introspectif pour dégager une réflexion émouvante sur les liens familiaux, la création artistique, et la nécessité de suivre sa propre voie. On appréciera la virtuosité du montage, alternant les huis clos de combat psychologique frontal, les séquences de traumatisme d’enfance (dont un terrifiant crash automobile source de toutes les vicissitudes), et les rares scènes de rue, reconstituées en grande partie en studio. Une seconde partie du film, plus lyrique et baroque, révèle des accents de tragédie grecque, tempérés par un humour discret.
’Boo’Radley 3 janvier 2010
Tetro - la critique
Chronique familiale intime un peu abstraite. Mais qu’importe, le fond du sujet n’est rien, car le fond ici c’est la forme. Toutes les possibilités du numérique sont mobilisées au service de l’image. Coppola, l’un des noms dont s’honore l’histoire du cinéma, s’émerveille, comme un enfant, de découvrir les nouvelles ressources laissées à sa portée : un clavier complet et tout neuf de moyens expressifs, sur quoi il tapote, pour se faire la main, quelques gammes.
Frédéric de Vençay 9 janvier 2010
Tetro - la critique
Coppola prouve une fois de plus qu’il est l’un des plus grands cinéastes américains de son temps : Tetro, sa liberté absolue, son amour du cinéma et de l’Art en général, sa constante recherche plastique, sa force émotionnelle, ses instants de grâce, ses comédiens géniaux (Vincent Gallo, enfin à sa juste valeur !), tout tient de l’éblouissement.