Le 22 octobre 2025
Steve n’a pas la prétention d’une grande fresque mais réussit, malgré ses maladresses, à proposer une expérience apte à secouer son spectateur.
- Réalisateur : Max Porter
- Acteurs : Emily Watson, Cillian Murphy , Tracey Ullman, Jay Lycurgo
- Genre : Drame
- Nationalité : Britannique, Irlandais
- VOD : Netflix
- Date de sortie : 3 octobre 2025
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– En VOD sur Netflix depuis le 3 octobre 2025
Résumé : Vingt-quatre heures dans la vie de Steve, un directeur d’une école qui lutte pour garder ses élèves dans le droit chemin.
Critique : Après avoir réalisé le grand chelem pour son rôle dans Oppenheimer de Christopher Nolan (BAFTA, Golden Globe, Oscar et Screen Actors Guild Award du meilleur acteur), Cillian Murphy revient à ses racines. Dans Steve, il incarne un professeur dévoué et torturé, pressurisé, brut et compatissant. Sur un peu plus de vingt-quatre heures, le film suit ce principal d’une école de la dernière chance pour jeunes garçons délinquants, affrontant tout à la fois les démons de ses élèves, les siens propres, et les menaces extérieures qui fragilisent son établissement déjà vacillant.
Excusons-nous d’espérer le voir un jour dans la peau d’un personnage heureux, mais il faut bien l’admettre : Cillian Murphy excelle dans la souffrance. Il saisit avec justesse la complexité des âmes brisées, dévoile leur profondeur au compte-gouttes. On retrouve cette subtilité qui le caractérise — ce mélange de gravité et d’humour discret, cette tension contenue jusqu’à l’explosion. Il est dans la continuité de ce que l’on a aimé de lui dans Peaky Blinders, Dunkerque ou The Wind that Shakes the Barley : un être blessé, en quête de rédemption, au secours d’autres êtres cassés. C’est un filon inépuisable pour le cinéma, mais un terrain glissant si le scénario s’autorise quelques facilités.

- © 2025 Netflix. Tous droits réservés.
Cillian Murphy retrouve ici Tim Mielants, après Small Things Like These, salué à la Berlinale 2024, et sans doute plus réussi. Steve, lui, paraît comme son cousin nerveux, parfois débordé par l’intensité qu’il cherche à maîtriser. Toutefois, le réalisateur filme le chaos avec une justesse rare, jouant sur la collision entre tumulte intérieur et extérieur. Son rythme alterne les accalmies trompeuses et les éclats de tension, sans jamais rompre la proximité qu’il crée avec ses personnages. Les acteurs, tous remarquables, sont filmés à une telle distance qu’on a parfois l’impression de partager leur chorégraphie, de respirer avec eux. Mielants s’inscrit dans ce courant de réalisateurs de fiction qui empruntent au documentaire sa rugosité et sa sincérité, à l’image du réalisme cru souvent salué dans les productions britanniques — on pense notamment à la série Adolescence.
Si cette esthétique appelle une émotion mesurée, parfois contenue, certaines séquences surprennent pourtant par leur dramatisation excessive. Après un début prometteur, le film souffre de ruptures de ton : quelques mouvements de caméra ou surimpressions au montage paraissent forcés, brisant la sobriété quasi sauvage du récit. Ces écarts désorientent, jusqu’à nous faire décrocher de ce réalisme viscéral.

- © 2025 Netflix. Tous droits réservés.
Faut-il y voir l’influence de Netflix, coproducteur du film ? Peut-être le géant du streaming cherche-t-il à vernir son image en s’offrant un drame social engagé. Sans procès d’intention, la patte Netflix reste néanmoins visible : une conclusion lumineuse, presque sucrée, qui tranche avec la noirceur du propos. Une fin aux couleurs d’arcs-en-ciel et de pâquerettes, pour un film dont la force tenait justement à son ombre, à sa dureté, à la morbidité de la curiosité ou de l’indifférence des privilégiés pour les laissés-pour-compte.
Steve n’a pas la prétention d’une grande fresque mais réussit, malgré ses maladresses, à proposer une expérience physique presque épuisante. On en ressort secoué, bousculé, parfois heurté — mais c’est aussi pour cela qu’on aime le cinéma : pour sa capacité à déranger, à nous faire chanceler un peu, avant de nous remettre debout.
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