L’adieu aux armes - La critique + test DVD

Critique : En 1932, lors de son entrée à la Paramount, le cinéaste Frank Borzage est chargé d’adapter pour le grand écran le court roman d’Ernest Hemingway intitulé L’adieu aux armes. Le studio lui impose un casting pour le moins hétéroclite puisqu’il confronte une grande dame de la scène théâtrale américaine, Helen Hayes, et une star du western, Gary Cooper. Ce dernier étant très impressionné par sa partenaire, il fut difficile de le mettre suffisamment en confiance pour qu’il puisse donner le meilleur de lui-même. On leur adjoint un Adolphe Menjou au sommet de sa carrière dans le rôle d’un truculent major italien. En dépit des efforts déployés par l’équipe technique, la récente arrivée du parlant impose un tournage en studio, retirant ainsi beaucoup de crédibilité à l’unique bataille du métrage. Mais finalement qu’importe puisque Borzage ne cherche à aucun moment à être réaliste !

© Paramount Pictures. Tous droits réservés.

La guerre n’est en effet qu’une toile de fond permettant de souligner la beauté d’une histoire d’amour impossible, celle d’un couple réuni, puis séparé, par la grande histoire. D’une grande sobriété pendant plus d’une heure, L’adieu aux armes se termine par une séquence mélodramatique flamboyante qui déchire le cœur. La musique somptueuse de Richard Wagner n’est pas pour rien dans ce sentiment de profond désespoir qui étreint le spectateur au sortir de la projection. Ce délire romantique et lacrymal est aussi un appel bouleversant à l’amour et à la paix dans un monde en proie à la tentation belliciste. De fait, la crise économique et la montée des totalitarismes au début des années 1930 font craindre le retour d’une "saignée". Ainsi, L’adieu aux armes prend le parti pris audacieux de vanter les mérites d’un déserteur dégoûté par l’absurdité de la guerre. Dotée d’une superbe photographie de Charles Lang (primé aux Oscar) et d’une mise en scène novatrice - Borzage utilise à plusieurs reprises la caméra subjective et monte ses batailles comme Eisenstein -, cette référence du mélodrame figure parmi les plus beaux films d’amour de l’histoire du cinéma. Rien de moins.