Le 5 octobre 2025
- Scénariste : Fano Loco>
- Dessinateur : Fano Loco
- Genre : Western
- Editeur : Nada éditions
- Famille : BD Franco-belge
- Date de sortie : 19 septembre 2025
Fano Loco écrit et dessine ce western des laissés pour compte, des minorités, Indiens, femmes, qui se font manipuler et balloter par le système. Une BD foisonnante, une fiction pas si irréelle qui fait réfléchir.
Résumé : {Mauvaise Fortune} débute dans les forêts de l’Amérique du Nord. Un campement indien dans la forêt, des colons qui les abattent à coup de fusil, un village, une ville puis un immense building se construisent avec les années et deviennent New-York. Début du vingtième siècle, au sommet de ce gratte-ciel, des riches industriels se réunissent et forment le Fortuny Club, qui domine le monde et chamboulera, sans le savoir, la vie du jeune indien Morning Bird, parqué avec les siens dans une réserve du Sud Dakota...
Critique : L’indien Morning Bird et la mexicaine Adelita Velarde Herrera Ortega de Guadalupe tentent de survivre dans cet Ouest entre sauvagerie et civilisation, amenés par l’immigrant venu prendre possession de ce continent. Et il y est arrivé, comme le démontre le Fortuny Club créé par les plus puissants et les plus riches d’entre eux. Tous les autres tentent de survivre.
Morning Bird nous montre l’impact des décisions prises en haut sur le quotidien de ceux qui ont peu, voire rien. Un impact qui fait couler le sang et provoque la mort de nombreuses personnes. Adelita, de son côté, s’embarque dans la révolution mexicaine espérant changer la société, mais elle se rend compte que la femme reste à la dernière place, car la révolution menée par des hommes est considérée comme est une affaire d’hommes, sauf pour les apparences médiatiques.
Morning Bird et Adelita font leur chemin, à leur manière, sur les routes des Etats-Unis. Chacun se heurte aux conséquences des décisions prises en haut, au Fortuny Club, où le seul intérêt est économique. Comment brasser des sommes faramineuses d’argent ? Détachés du quotidien des citoyens moyens, les voyant comme une manne à exploiter, un troupeau à calmer, les membres du club explorent leurs idées, sans se soucier des conséquences humaines.
Ce regard porté sur ce monde reflète assez bien ce qui se passe dans le notre. Et la grande intelligence de Fano Loco, c’est de ne pas diviser le monde en deux, comme Blondin, le chasseur de primes du film de Sergio Leone.
Il n’y a pas d’un côté les démunis, représentés par Adelita et Morning Bird, et les ultra-riches, représentés par le Fortuny Club. Il y a tout l’entre deux. Le petit peuple qui s’adapte au monde en constante évolution, du mieux qu’il peut, les intermédiaires qui ont conscience du fonctionnement du système, mais l’accepte en s’enrichissant sur le dos des plus aveugles qu’eux, ceux qui vivent en marge du système, ceux qui y croient, ceux qui s’en servent, ceux qui exécutent les ordres...
Et c’est bien pour ça que cette BD, au-delà de cette aventure épique, nous amène à réfléchir. Nous ne sommes ni des membres du Fortuny Club, ni des rebelles comme Morning Bird et Adelita : nous faisons majoritairement partie de ceux qui vivent dans le système, n’y croient plus trop et tentent de limiter la casse. Peut-être qu’il est temps de redresser la tête, en regardant au-delà des jeux qu’on nous donne pour masquer la misère qui nous étouffe.
© Fano Loco / Nada éditions
Fano Loco offre un graphisme très brut, qui a été un travail de longue haleine qu’il porte depuis très longtemps. Après la rencontre avec Nada Editions, il a fallu encore quatre ans pour finaliser cette BD. Et cela se comprend, tant l’histoire est dense et part dans plusieurs directions avant de tendre vers une fin homogène. Le trait nerveux mêle de manière tout à fait cohérente des aplats de noir et blanc contrasté avec des dessins aux hachures multiples. L’épure d’un côté et la densité du trait de l’autre, sans oublier les cases où les deux se mélangent. Les plis, les ombrages, créées par des hachures dans toutes les directions apportent une dynamique au dessin. Fano Loco mélange pinceau et feutre noirs pour arriver à ce dessin vif.
Le noir et blanc est augmenté d’une couleur situé entre le sépia et l’ocre. Elle renforce les ombrages, fait ressortir les personnages sur le fond, tombe en aplat, contribue au relief des vastes paysages. Elle est omniprésente mais utilisée de nombreuses manières différentes, tout comme le noir. L’histoire forte et intelligente, parfois drôle, est encore rehaussée par ce dessin vivant, en bichromie, à la croisée de deux styles.
Mauvaise Fortune est un western crépusculaire, qui marque la fin d’un monde sauvage et libre pour le remplacer par un autre brutal et clivant, baptisé à juste titre la société de consommation. On suit deux personnes écrasées par le système, et qui veulent juste survivre.
176 pages – 25 €
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Galerie photos
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