Le 13 décembre 2025
- Réalisateur : Nyima Cartier
- Plus d'informations : Le site de la Fondation Gan
Nyima Cartier est lauréate prix de la création pour son projet de film Chien Noir. La Fondation Gan œuvre avec constance à l’émergence d’une nouvelle génération de cinéastes.
Depuis son origine, il y a plus de 35 ans, la Fondation Gan n’a eu de cesse d’œuvrer avec constance à l’émergence d’une nouvelle génération de cinéastes, de défendre un cinéma de qualité et original, de l’écriture du scénario jusqu’à la diffusion des œuvres en salle, grâce à l’Aide à la Création et l’Aide à la Diffusion, ses principales missions. C’est aujourd’hui une belle communauté de plus de 250 réalisateurs, riche de plus de 700 œuvres. Depuis sa création, on compte : plus de 5000 scénarios lus 94 % de films tournés, 40 % de lauréats réalisant plus de 3 films, 30 % de lauréats réalisatrices 1 Oscar. 43 César, 40 Prix à Cannes dont 1 Palme d’or.
Qu’est-ce que l’Aide à la Création de Fondation GAN ?
L’Aide à la Création de la Fondation Gan consiste à récompenser chaque année des projets de longs métrages de fiction (premiers et seconds films), sélectionnés sous la forme de scénario. Pour l’accompagner dans ses choix, la Fondation invite un jury composé de personnalités du monde du cinéma. La dotation par projet est de 53 000 €, avec 3000 € pour le réalisateur et 50 000 € pour le producteur.

- Le jury : Dominique Hoff, Richard Sidi, Frédéric Farrucci, Claire Paoletti
- Crédit : Pauline Maillet
Cette année, le jury de l’Aide à la Création était présidé par le cinéaste Frédéric FARRUCCI avec, à ses côtés, Claire PAOLETTI (scénariste, productrice et réalisatrice), Denis ROSTEIN (Directeur général de Universciné), Richard SIDI (Directeur de La Maison du Film) et Dominique HOFF (Déléguée générale de la Fondation Gan).
Deux commissions ont été organisées en 2025 et 116 scénarios étudiés (comprenant 73 % de premiers longs-métrages, 27 % de seconds et 46 % de projets proposés par des réalisatrices). Quatre cinéastes ont été récompensés.
Lila Pinell pour son projet SHANA ; premier long métrage de fiction en solo produit par Emmanuel Chaumet
Guillaume Renusson pour son projet 43 ; deuxième long métrage produit par Pierre-Louis Garnon
Hélène Rosselet-Ruiz pour son projet LE TRIANGLE D’OR ; premier long métrage produit par Marie-Ange Luciani
et Nyima Cartier pour son projet CHIEN NOIR produit par Joséphine Mourlaque et Antoine Salomé
Entretien avec Nyima Cartier, lauréate Prix de la création pour son projet de film Chien Noir
Votre projet de film Chien Noir semble profondément noué à une exigence politique, à savoir rendre visible et audible une violence systémique à l’encontre du corps féminin, encore largement tabou dans le cinéma français.
J’ai envie de faire des films qui parlent du monde contemporain. Mon envie de cinéma est de raconter des histoires et le monde dans lequel j’habite à travers des récits qui sont à la frontière du réel, afin d’approcher au mieux la véracité des personnages. Ce n’est pas la première fois que je m’intéresse au monde du travail et à ses rapport de force, je veux le traiter par le cinéma avec une étrangeté qui le décale un peu. Je ne me situe pas dans un cinéma purement réaliste
Le genre vous permet donc de saisir au mieux le réel ?
Oui absolument, mais plus encore le genre me permet de mieux le digérer, car une trop grande frontalité avec le réel, dans une veine purement réaliste, ne me permettrait pas d’appréhender au mieux ses enjeux, ni de faire ressentir vraiment ce dont il s’agit.
Vous avez écrit avec Samuel Doux, scénariste et écrivain. J’aimerais aussi savoir quelle est la part d’intime dans ce scénario.
Il y a plusieurs éléments qui fondent l’origine du film. Il y a une blessure intime, mais surtout le désir de raconter et de plonger dans la violence d’une femme, afin d’utiliser cette violence, comme la colère, subie, comme une reprise du pouvoir. Il y a aussi une image centrale, récurrente et omniprésente : la rencontre de cette femme et de ce chien. Je porte en moi cette image originelle d’une femme avec un chien dans la ville. C’est aussi raconter le surgissement du sauvage dans un univers soit disant civilisé, à savoir le monde du travail, et plus particulièrement celui des start-up qui s’avère être en fait structuré par la domination et la violence.
Le chien est une figure puissante, fictionnelle, éminemment philosophique. Racontez-nous votre chien...
Le personnage principal, après s’être fait sexuellement agressé par un des deux fondateurs de la boîte dans laquelle elle travaillait, croise un chien. Il est effrayant car assez brutal et bestial, et en même temps elle y voit un potentiel compagnon de route. Le chien est l’arme de sa vengeance et aussi le seul être vivant avec qui elle arrive à se connecter. Il devient son double animal. Le film se passe dans les deux semaines qui suivent le viol, elle est dans un moment de sidération, à la frontière du réel. Elle est dans un état second où le réel est un peu déréalisé, et c’est à ce moment-là que le chien surgit dans sa vie.

- Nyima Cartier
- Crédit : Pauline Maillet
Est-ce un chien ou une chienne ?
Je ne statue jamais sur son sexe, il n’a pas non plus de nom. C’est un chien, c’est tout.
Comment allez-vous faire vivre au spectateur une expérience de la destruction, sans l’inclure dans une relation obscène et complice avec cette violence ? Je pense notamment à la séquence du viol
On a beaucoup d’images des scènes de viol, qui ont été essentiellement filmées par des hommes, et qui, pour la plupart, sont assez mal représentées, avec souvent un point de vue romantique, voire un peu voyeuriste. Je veux filmer et montrer cette scène de viol dans une représentation qui correspond au réel. Car son violeur fait partie de sa vie, ce n’est pas un homme qui surgit un soir d’un parking pour la violer. C’est son responsable au travail et son ami aussi, qu’elle connaît depuis toujours et en qui elle a confiance. Il a le même âge qu’elle. Il n’y a pas de couteau sous la gorge.
Vous soulevez un point essentiel, en cela que la violence subie provient majoritairement des proches, avec qui souvent la victime entretient une relation intime.
C’est rarement filmé, comme si c’était encore un tabou, il y a un déficit énorme de représentations, alors que nos imaginaires sont faussées par des images fantasmées du viol... Raison pour laquelle j’ai choisi de filmer cette scène. Pour montrer.
C’est une expérience que vous voulez proposer au spectateur.
Oui car le film se veut très immersif, on est dans sa peau. C’est un film de vengeance mais sans lyrisme ni exaltation, au contraire. Je suis très loin de toute représentation qui célèbre la violence, loin de là. Je veux explorer ce désir de vengeance, donc de violence, avec toutes les hésitations, doutes qui traversent le personnage. C’est un récit ancré dans le réel, et qui ressemble probablement à ce que je ferais. Je me sens plus proche d’Andréa Arnold, ou d’autres cinéastes que j’adore, soutenus par la Fondation Gan, Kamal Lazraq qui a réalisé Les Meutes, Clément Cogitore pour Ni le ciel ni la terre, et Alice Winocour pour Augustine. Ce sont des cinéastes que je respecte et admirent beaucoup et dont je me sens proche dans leurs approches formelles, des cinéastes qui travaillent la frontière avec le genre.
Parlez-moi de votre rapport avec la Fondation Gan.
C’est la première fois que je suis lauréate de la Fondation Gan et j’en suis absolument ravie. En début d’année, j’ai obtenu les Ateliers d’Angers, et il y a une sorte de filiation avec la Fondation. C’est un soutien fondateur pour le cinéma d’auteur, et pour les premiers films. Je trouve aussi que la Fondation Gan a une ligne éditoriale, un engagement pour des films qui parlent du monde, où tous les cinéastes primés sont dans une recherche formelle sur des récits ancrés dans dans le réel. Le président du jury de cette année était Frédéric Farrucci, il a un vrai sens du cinéma et un engagement politique de haute tenue. Je me souviens lorsque je me suis retrouvée devant le jury, je me sentais assez proche de son cinéma, il a un vrai goût pour le genre. Toutes les questions qu’il posait sur la mise en scène correspondaient à mes propres questionnements. J’ai eu l’impression qu’on parlait la même langue.
À quel stade êtes-vous actuellement de la production ?
Je prévois de tourner en mars 2026, même si tout n’est pas finalisé. Le rôle principal est là, comme le chien d’ailleurs.
CHIEN NOIR
Synopsis
Claire a 29 ans et travaille dans une start-up montée par deux jeunes hommes pleins d’ambition, Arthur et Benjamin. Alors qu’ils fêtent leur première levée de fonds, Benjamin viole Claire. La jeune femme s’effondre, ne donne plus de nouvelles et reste chez elle, sidérée. Jusqu’à ce qu’elle fasse la rencontre d’un mystérieux chien, nouveau compagnon qui va lui donner la force de se relever, et d’affronter son agresseur.
Scénaristes : Nyima Cartier et Samuel Doux
Producteurs : Joséphine Mourlaque et Antoine Salomé (Mabel Films) & Marc-Antoine Robert et Xavier Rigault (247 Films)
Parcours de la réalisatrice
Diplômée de la Metropolitan Film School de Londres, Nyima Cartier réalise en Angleterre WHITE LIE, adapté de son scénario de fin d’études. De retour en France, elle signe un court métrage NAKO (Meilleure fiction au Bogoshorts, sélectionné à Palm Springs, Hamptons, Uppsala...). Elle réalise en 2021 deux courts métrages produits par Mabel Films, LE LAC (Paris Court Devant, Sarasota...) et L’HOMME SILENCIEUX (Prix Qualité du CNC, sélectionné aux César 2022, Diffusion Canal+).
Sociétés de production
Mabel films est une jeune société de production fondée en 2017 par Joséphine Mourlaque et Antoine Salomé. Ayant tous deux travaillé plusieurs années dans la production de long métrages au sein de sociétés d’envergure (respectivement Nord-Ouest Films et Wildbunch), ils décident de s’associer afin de produire des cinéastes de leur génération dépositaires du cinéma français de demain. Depuis sa création, la société a produit 16 courts métrages multi-primés, dont plusieurs sélections et une nomination aux César. Mabel films porte aujourd’hui 6 projets de long métrages en développement.
Depuis la sortie de son tout premier film PERSEPOLIS, 247 Films (créée en 2004) s’est forgée une image de société indépendante à la ligne éditoriale éclectique et qualitative assumée. Après 19 longs-métrages de cinéma et de nombreuses récompenses reçues, la société reste toujours aussi active et continue d’accompagner des cinéastes confirmés ou en devenir, autour de projets « coups de cœur ». Les productions de 247 Films vont ainsi du cinéma engagé à la comédie d’auteur en passant par le film de genre avec, à chaque fois, une exigence de qualité et une curiosité sans cesse renouvelée.
Informations
Tournage à Bordeaux et en Normandie en mars 2026. Au casting : Meghan Northam. Distribué par Condor Distribution.
Galerie Photos
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