Le 1er septembre 2025
- Réalisateur : Cécilia Rouaud
- Acteur : Valérie Karsenti
- Distributeur : Société nouvelle de distribution (SND)
- Festival : Festival d’Angoulême 2025
– Sortie en salle : 3 septembre 2025
Nous avons rencontré Cécilia Rouaud et Valérie Karsenti au Festival d’Angoulême pour évoquer la comédie "Adieu Jean-Pat".
Présentée en avant-première au Festival du Film Francophone d’Angoulême, la réjouissante comédie de Cécilia Rouaud débarque en salles ce mercredi 3 septembre. L’occasion d’évoquer avec la réalisatrice, et son actrice Valérie Karsenti, les contours de ce film qui allie l’humour et l’émotion, tout en abordant des sujets graves.
Cette histoire a été initialement écrite par Fabcaro et le regretté Laurent Tirard. Qu’est ce qui vous a incité à la mettre en scène ?
Cécilia Rouaud : En effet, Laurent Tirard et Fabcaro m’ont fait l’immense cadeau de me confier la réalisation de leur scénario. Laurent m’a dit qu’il se retrouvait dans mon travail par mon mélange de l’humour et de l’émotion, en cherchant à faire rire avec le gravité et à émouvoir avec ce qui est plus doux. Il pensait que mon univers se mélangerait parfaitement avec ce scénario que je trouvais à la fois drôle, percutant, touchant et qui traite de sujets profonds, le harcèlement, la paternité, l’amour, le couple, l’amitié, la mort, la vie, mais avec beaucoup de dérision, beaucoup de joie. Il y a un aspect très solaire, très lumineux qui permet de raconter cette histoire joyeusement, tout en évoquant l’état du monde actuel.
Valérie Karsenti : En découvrant le scénario, j’étais persuadé qu’il avait été écrit initialement par Cécilia tant j’y ai retrouvé tout le sel de son cinéma, avec notamment une grande tendresse pour ses personnages.

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Justement, que pouvez vous dire sur cette femme que vous incarnez, une mère endeuillée par la perte de son fils… et relativement à côté de ses pompes tant elle ne semble pas se rendre compte à quel point son enfant pouvait être un connard ?
Valérie Karsenti : C’est un personnage très sincère et effectivement à côté de ses pompes car elle ne veut pas voir qui était vraiment son fils. Quand on a un enfant, on est aveuglé, on l’aime de manière inconditionnelle. Et puis s’il est mort, peu importe qu’il ait été un connard car il n’aura pas de vie et ne connaîtra pas ce qu’il aurait dû connaître. Je me souviens avoir perdu une copine de classe dans un accident lorsque j’étais enfant. Et j’ai vu sa mère devenir folle. Et cela avait parfois quelque chose de drôle de l’observer partir ainsi en vrille. C’est ce que j’aime dans la comédie, c’est le fait de pouvoir travailler sur les ratés, les misères de la vie.
La prouesse de votre film, c’est de parvenir à susciter le rire avec deux sujets pourtant très graves, en l’occurrence le harcèlement et la mort.
Cécilia Rouaud : Les comédies italiennes travaillaient beaucoup à cela, comme une sorte d’exutoire. La comédie peut servir à réparer les vivants de la perte de leurs proches. J’aime montrer des personnes qui essaient de faire au mieux, malgré leurs erreurs et le chaos qu’elles provoquent. C’est ce qui les rend tous touchantes : même s’ils peuvent être folles, bancales, égoïstes ou absurdes, elles essaient de bien faire. À partir de là, on peut tout se permettre car le spectateur va forcément les aimer.
Valérie Karsenti : Pour ma part, en voyant le film, j’ai été cueilli par le personnage du père de Jean-Pat, interprété par Thibault de Montalembert, qui essaie d’oublier son chagrin en faisant visiter sa cuisine. On ne peut pas imaginer la peine d’un père qui perd son enfant. Il tente de survivre en se focalisant sur des choses anodines. C’est ce qui rend ce film si authentique et plein de vérité.
Votre personnage principal a été victime de harcèlement dans sa jeunesse. On voit à quel point cela impacte sa vie d’adulte alors que son entourage tente de minimiser ce qu’il a pu endurer...
Cécilia Rouaud : Cette humiliation initiale est constitutive de ce qu’il est aujourd’hui. Il manque de confiance en lui, donc de certitudes dans le fait que la femme avec laquelle il est en couple puisse l’aimer vraiment. Ce qui l’amène à s’interroger : lui l’aime vraiment ou l’aime-t-il juste parce qu’elle l’aime ? Donc oui, ces jeux d’enfants ont été un trauma. Au début du film, son premier objectif est d’éventuellement reconquérir son amour de jeunesse pour s’assurer qu’il ne soit pas passé à côté de sa vie, avant de comprendre qu’il a surtout besoin d’accepter de grandir, de s’engager, qu’on puisse l’aimer et lui faire confiance.
Valérie Karsenti : Il doit aussi accepter qu’il a été victime et l’assumer consciemment. C’est tout le problème des victimes : elles s’inscrivent dans un déni et intègrent l’idée que ce qu’elles ont vécu n’est pas grave, hormis quand il s’agit d’événements vraiment extrêmes. Mais les traumas du quotidien que l’on subit tous sont peu considérés, alors qu’ils peuvent être dévastateurs.

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Pourtant, ces traumas quotidiens ne sont pas toujours considérés. Dès qu’on les mentionne, on peut être accusé de se « victimiser »…
Valérie Karsenti : C’est parce que ceux et celles qui n’interviennent pas ont intérêt à minimiser ce que vous subissez. Ou alors ils sont dans la même situation et s’inscrivent dans le déni. C’est tout un réseau de complicité ou de déni qui fait que c’est complexe d’affirmer que ce que l’on a pu vivre n’est pas normal. À l’échelle de l’enfance, ces événements peuvent briser des confiances.
Cécilia Rouaud : Mais le film raconte que c’est réparable. Il est important de raconter cela car quels que soient les événements que l’on a vécus enfant, le lien avec les autres nous permet de nous réparer, d’avancer. le film est porté vers le rire, la joie, la réparation et la vie. Même si l’histoire se déroule lors d’un enterrement (rires).
Les dialogues du film sont très percutants. Pas besoin d’improviser beaucoup dans ces cas là, on imagine ?
Valérie Karsenti : Le texte était effectivement très solide pour qu’on puisse suffisamment s’appuyer dessus. Et Cécilia laisse les acteurs le plus libres possible afin que l’on puisse s’amuser à l’intérieur de cela pour inventer des choses en plus.
Cécilia Rouaud : Plus j’avance dans ma carrière de cinéaste, plus j’éprouve du plaisir à considérer ce qui advient et pas ce que j’aurais voulu qui advienne. Je suis donc très ouverte aux propositions de mes comédiens.
Et l’émotion, comment se construit-elle ?
Cécilia Rouaud : Beaucoup plus sur l’interprétation et comment chaque acteur prend en charge son personnage et suscite une empathie chez le spectateur. La sincérité des personnages et des situations permet de toucher le public. C’est de là que naît l’émotion et que l’on va rire avec eux, pleurer avec eux, être heureux avec eux.
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