Le 4 novembre 2025
- Scénariste : Fanny Vaager>
- Dessinateur : Annika Linn Verdal Homme
- Genre : Chronique sociale, Humour
- Editeur : L’Agrume
- Date de sortie : 25 septembre 2025
Un récit explosif qui questionne le rôle social des artistes – représenté ici par un groupe de rappeuse dans le vent – et leur pouvoir dans un monde gouverné par l’image et l’argent des grandes firmes.
Résumé : Asha, Ivy et Farzana sont trois jeunes rappeuses norvégiennes qui tentent de vivre de leur art ; en attendant, elles ont un travail alimentaire et répondent aux questions (pas toujours pertinentes) de radios locales. Les trois jeunes femmes sont approchées par les responsables de la communication du groupe pétrolier Tatol, qui leur proposent de réaliser un clip pour gagner en notoriété auprès du jeune public sur les réseaux sociaux. Tatol permet au trio une liberté de création ainsi qu’un chèque substantiel. Après avoir hésité, les rappeuses acceptent et produisent un morceau provoquant et se filment face à une Tesla en flammes. Le succès est inespéré : le titre devient viral sur les réseaux sociaux, et malgré le caractère provoquant de la chanson, les communicants de Tatol sont ravis. Jamais l’entreprise n’a compté autant de {followers} sur les réseaux… Mais ce qui était un coup de communication dérape lorsqu’une {trend} se développe sur les réseaux sociaux : inspirés par la chanson, certains se filment en train de brûler des Tesla, puis d’autres passent à la violence physique. Alors que Tatol ne semble guère se soucier de ces dérives, les trois filles s’interrogent sur leur responsabilité sociale…
Critique : Doté d’une couverture pour le moins originale – où l’on voit un bébé qui tient une Tesla en flammes, sur un fond lui-même enflammé –, Photo d’une T3sla en feu interpelle pour donner un coup de projecteur sur un phénomène de société : la culture du buzz sur les réseaux sociaux et l’absence de toute responsabilité sociale des grandes entreprises. Peu importe pour Tatol – déformation de Statoil, premier groupe pétrolier de Norvège, ou de Total ? – la nature du message ou les conséquences du clip proposé par le trio de rappeuse : seul compte l’augmentation du nombre de followers et le fait que l’entreprise gagne en notoriété, pour arriver en position de force dans ses négociations avec le gouvernement norvégien. Et ce n’est pas un problème si le clip provoque des troubles à l’ordre public : peut-être même que l’entreprise pourra en tirer parti…

- © Fanny Vaager, Annika Linn Verdal Homme / L’Agrume pour l’édition française
Rappeuses engagées, Asha, Ivy et Farzana ont l’idée de détourner l’objectif de l’entreprise avec leur clip, mais elles se retrouvent prises dans un engrenage qu’elles ne maîtrisent pas. L’unité du trio se sclérose, entre Asha qui souhaite poursuivre la campagne et Ivy et Farzana qui se désolidarisent des violences. Derrière un discours néo-managérial ridicule fait d’anglicismes et de phrases toutes faites – les planches qui montrent les communicants de Tatol sont à cet égard particulièrement savoureuses –, Tatol développe une stratégie particulièrement cynique, qui va faire ses preuves au détriment des trois jeunes femmes. S’ajoute au récit le caractère absurde du bébé géant, qui tire le récit vers le fantastique et le grotesque, et ne manquera pas d’interroger le lecteur…
Photo d’une T3sla en feu surprend par la diversité de ses séquences graphiques : aux planches dotées d’un gaufrier traditionnel qui présente un dessin coloré aux personnages stylisés avec de nombreux point de trames qui confèrent un « grain » aux pages s’ajoutent des passages franchement originaux, avec des doubles planches psychédéliques centrées sur un écran de téléphone et la représentation en aquarelle d’un foetus qui grandit… La narration s’appuie également sur l’insertion de textes présentées dans les notes d’un téléphone, pour mieux faire ressortir l’ancrage numérique de l’histoire. Si l’expérimentation graphique est au rendez-vous, le récit se tient bien et conserve sa cohérence jusqu’à la dernière page, qui propose une conclusion assez cynique, mais très représentative de notre monde actuel.

- © Fanny Vaager, Annika Linn Verdal Homme / L’Agrume pour l’édition française
Récit social porté par une proposition graphique originale, Photo d’une T3sla tire sur la récupération de l’art par le capitalisme à travers l’histoire de trois rappeuses prises dans les filets d’une multinationale au cynisme débridé. Le rapport entre création artistique, communication et récupération capitalistique est interrogé de façon particulièrement pertinente par ces deux autrices norvégiennes qui font exploser les pages pour livrer un récit drôle et enlevé.
304 pages – 23,5 €
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