Sous les bombes sans la guerre - La chronique BD

Résumer Sous les bombes sans la guerre paraît difficile, tant cet album fracasse les codes de la bande dessinée traditionnelle. On peut raconter la maladie, l’accompagnement d’un père malade à travers son passé et son fils bien présent de beaucoup de façons, L.L. de Mars a choisi une fresque clairsemée sur plusieurs pages. Tantôt planches, tantôt gravures, les influences sont aussi nombreuses que les confluences. Le personnage principal est inspiré par Pif le Chien tandis que Top (son ancêtre communiste et humaniste), le second, est un personnage cartoonesque qui vit, ou plutôt survit, à des atrocité réelles et des horreurs oniriques. Inquisition, guerre civile, hôpitaux et morgues sont à l’honneur, dans une plongée dans les profondeurs de l’âme, lorsqu’elle voit sa fin approcher. Vous l’aurez compris, pas d’optimisme, pas de paradis, mais une description de l’humanité face à la souffrance, plus tranchante, à peine apaisée par les personnages animalesques. Choquer, apporter de l’intensité sont clairement les mots qui ont guidé les pinceaux de l’auteur, face à l’impuissance de chaque être humain lorsque la Mort se présente.

© Éditions Tanibis

Le dessin justement, est la force de cet univers déjà puissant par son thème. La violence, la crudité des personnages est en contraste avec le choix des chiens aux mines sympathiques, presque enfantins, qui pourraient se rapprocher de Disney. Les traiter en noir et blanc, en dégradés de rouge sanguins, les dépecer au sens propre comme au sens figuré, relève d’un certain courage, ou du moins d’un sens artistique sûr, entre cynisme et progressisme. Là aussi, le lecteur sera choqué, dérouté et tourmenté par ce qu’il voit, même si ce qu’il lit reste, après coup, le plus impressionnant. La mort est moche, qu’elle soit sous les explosions ou sous les perfusions, et le dessin se devait donc d’être laid, affreux, terrible. On peut donner des aspects sympathiques à la Faucheuse, l’habiller pourquoi pas de couleurs attachantes, mais ce n’était clairement pas le parti de L.L. de Mars, qui a choisi de trancher dans le vif, pour le meilleur et le morbide.

© Éditions Tanibis

À la fois grave et ironique, angoissante et attractive, c’est une œuvre hybride et paradoxale qui sont aux éditions Tanibis, que seule une lecture attentionnée peut véritablement rendre. Car au final, pour les émotions personnelles, le lecteur demeure le seul juge.