Le 4 juillet 2025


- Scénariste : Tiago Minamisawa>
- Dessinateur : Guilherme Petreca
- Genre : Drame
- Editeur : Ankama
- Famille : BD Franco-belge
- Date de sortie : 6 juin 2025
Tiago Minamisawa écrit cette histoire dramatique qui lui a été inspirée par un atroce fait divers datant de 2017 au Brésil : la capture, l’enfermement, la torture et le meurtre d’une personne transgenre, Dandara Dos Santos, filmée et diffusée sur les réseaux sociaux. Tiago Minamisawa a été bouleversé par la vidéo, il en a sorti ce récit étrange, magique et dur. Guilherme Petreca dessine et réalise les couleurs de cette magnifique BD, histoire symbolique à plusieurs niveaux de lecture qui fascine et transporte.
Résumé : {Kabuki} débute sur la scène d’un théâtre japonais. Un jeune enfant, Kabuki, arrive cérémonieusement, se regarde dans un miroir. Insatisfait par son reflet, il se mord le doigt et dessine en rouge sang contour des yeux et rouge à lèvres. Kabuki semble heureux. Il aperçoit le visage d’une belle jeune femme dans le miroir. Mais une créature de fumée noire avec comme visages des masques de Nô surgit et maltraite Kabuki, le traitant de monstre et d’aberration. L’enfant bascule de la joie à la honte et prend une décision lourde de conséquences…
Critique : Cette BD nous entraîne dans l’esprit de Kabuki, jeune garçon qui va assumer sa nouvelle identité et renaître femme. Ce parcours est symbolisé sur quatre saisons, où la protagoniste passe de l’enfance à l’âge adulte. On part de la scène du théâtre pour s’envoler ailleurs, dans des grands espaces où Kabuki doit trouver son chemin, doit s’accepter elle-même malgré le rejet des autres.
Ce récit tout en finesse passe par de nombreuses symboliques, dont celle du théâtre japonais qui met en scène le masque. Quel masque porter en société, et comment s’affranchir du masque pour être soi-même ? C’est ce que Kabuki recherche. Sa seule aide est sa part féminine, Alma, qui tente de le guider, mais Kabuki a parfois du mal à suivre ses conseils, encore ancré dans la peur des autres et du rejet.
Ce parcours pour atteindre sa véritable identité est jonché d’obstacles qu’il faudra dépasser. Le choix du théâtre n’est pas un hasard, le jeu entre le comédien et le personnage qu’il incarne est vraiment creusé dans le théâtre Kabuki. Le comédien peut prendre la parole pendant la pièce au lieu de son personnage. Il y a le fait aussi que tous les rôles sont tenus par des hommes, même ceux de femmes. Et bien sûr, la place du masque, qui fige le visage dans une identité autre, de la courtisane au démon.
La BD est truffée de tels parallèles qu’il est important de décortiquer pour profiter pleinement de l’histoire. Elle forme la déclinaison papier d’un court-métrage en stop motion qui a pris de nombreuses années. Un QR code fourni dans la BD permet de découvrir le trailer de ce film.
Tiago Minamisawa scénarise cette histoire poétique et dramatique et c’est Guilherme Petreca qui dessine ce récit, optant pour de longues séquences sans dialogues. Son trait fin, ses jeux d’ombrage accentuent les volumes. Les couleurs magnifiques apportent de l’ampleur au récit, en appuyant sur les différentes étapes de l’évolution de Kabuki. Elles rappellent l’aquarelle et parfois les crayons de couleur. Vives, denses, contrastées, elles portent aussi leur lot de symboles, du rouge qui suit le personnage toute sa vie au noir omniprésent sur la scène du théâtre.
La composition des planches laisse le temps au récit de s’installer, de se développer et à Kabuki de se chercher pour finalement s’accepter. Les cases s’enchaînent et nous plongent dans les pensées de la protagoniste, écrites ou illustrées visuellement.
Kabuki est une BD forte, aux symboliques importantes, marquantes et nombreuses. L’histoire d’une personne transgenre qui doit trouver sa propre personnalité, un récit inspiré par des faits atroces mis en scène et en image avec poésie, mais sans occulter les difficultés.
152 pages – 19,95 €
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