Le 4 mars 2025


- Réalisateur : Hu Guan
- Acteurs : Zhang Yi, Jing Liang, Eddie Peng, Liya Tong, Jia Zhangke
- Titre original : Gou Zhen
- Distributeur : Memento Distribution
- Genre : Drame, Film animalier
- Nationalité : Chinois
- Date de sortie : 5 mars 2025
- Durée : 1h50mn
- Titre original : Gou Zhen
- Festival : Festival de Cannes 2024
Le prix Un certain Regard est amplement mérité pour cette œuvre sur la rédemption et le sauvetage des âmes aux fins fonds d’une province chinoise qui peine à trouver sa voie vers la modernité.
Résumé : Lang revient dans sa ville natale aux portes du désert de Gobi. Alors qu’il travaille pour la patrouille locale chargée de débarrasser la ville des chiens errants, il se lie d’amitié avec l’un d’entre eux. Une rencontre qui va marquer un nouveau départ pour ces deux âmes solitaires.
Critique : Comme dit le proverbe, qui veut noyer son chien l’accuse de la rage. C’est justement la lutte que mène une ville contre les chiens errants, qu’elle s’est déterminée à enfermer dans des chenils, et particulièrement un grand animal noir, une sorte de lévrier, amaigri par la faim. À sa manière, le héros Lang, qui sort de dix années d’incarcération pour un homicide, a de commun avec l’animal une forme de sauvagerie teintée de solitude. Il se défend avec les poings contre des groupuscules qui l’accablent pour l’homicide commis il y a longtemps. L’homme revient justement dans son village natal pour se racheter une conscience, et quand il ne trouve pas sur son chemin des personnes prêtes à l’aider pour sa réinsertion, il rencontre des êtres hostiles et peu enclins à lui favoriser son installation. Et pendant ce temps, Pékin se prépare à accueillir les Jeux olympiques de 2008, et à une éclipse de soleil qui signera peut-être l’entrée en modernité de ce village reculé.
- Copyright Memento Distribution
Black Dog constitue un film d’une grande beauté. Le long-métrage s’ouvre sur une irruption de chiens sauvages depuis le haut des montagnes du désert de Gobi, dont la splendeur tranche avec la pauvreté du village, et l’extrême dénuement dans lequel vivent ses habitants. Lang, qui parle peu, apparaît comme un être presque fantomatique, avec son père qui a décidé de terminer sa vie dans un zoo en perte de vitesse. Le réalisateur Hu Guan choisit une langue cinématographique très ample, qui offre aux personnages une épaisseur quasi romanesque. Ils errent, à la manière des chiens dans la ville, au milieu de bâtiments presque vides, où la vie semble s’être arrêtée. Curieusement d’ailleurs, un souffle de vie resurgit au moment où tous les habitants se précipitent dans le désert pour admirer l’éclipse de soleil.
La poésie et la solitude forment la matière principale de ce film, très original par bien des aspects. On est d’abord stupéfait par la manière dont le metteur en scène est parvenu à gérer ces hordes de chiens, et notamment le lévrier noir qui passe de l’agressivité à l’affection envers le protagoniste. Le film se caractérise par une grande pudeur dans la manière d’aborder ces âmes esseulées qui tentent de se reconstruire un sens à la vie. Le réalisateur filme avec beaucoup de dignité ses personnages, qu’il s’agisse des habitants ou des protagonistes principaux, avec l’intention de ne jamais juger les choix qu’ils opèrent dans leurs existences, où le temps semble s’étirer plus longuement qu’ailleurs. Des formes de solidarité, d’échanges s’inventent entre ces gens qui se soucient d’insertion des sortants de prison et attachent une importance au pardon et à la rédemption.
- Copyright Memento Distribution
Naturellement, il faut parler de ce chien noir, maigre, enragé, poursuivi par les gardes civils comme un criminel. On peut faire l’hypothèse que l’animal illustre la manière dont la Chine arbitre la liberté de ses citoyens, dans un univers où en permanence des hauts parleurs annoncent l’actualité et les comportements à tenir. Derrière les poursuites des animaux errants se trament des tractations commerciales douteuses, commises sous le manteau, comme le signe d’un pays qui doit composer en permanence entre son désir de maintenir l’ordre et les marges de liberté que s’accordent les citoyens.
Le Prix Un certain Regard accordé à Black Dog au Festival de Cannes 2024 préfigure l’émergence d’un cinéma chinois engagé qui tente de synthétiser la nostalgie d’un passé et une modernité s’avançant à grands pas. Le réalisateur Hu Guan a derrière lui une vaste filmographie, inconnue de nos écrans. Black Dog signe l’aboutissement d’un regard du cinéma chinois sur son passé récent, grâce à une mise en scène très maîtrisée et une photographie d’une grande perfection. L’acteur principal, Eddie Peng, se moule parfaitement dans cet univers désertique et austère qui donne à voir et à penser une province chinoise aux allures de fin du monde.
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