Le 23 mai 2025


- Scénariste : Machiko Kyô>
- Dessinateur : Machiko Kyô
- Genre : Drame
- Editeur : Imho Editions
- Famille : Manga
- Date de sortie : 11 avril 2025
Machiko Kyo écrit et dessine cette histoire librement inspirée du Journal d’Anne Frank. Elle nous livre un récit poignant, étonnant, où se mêlent le fantastique, l’onirisme et la réalité crue.
Résumé : {Le journal de Hanako} débute sur une porte qui s’ouvre, celle de la couverture d’un journal intime doté d’une petite serrure. Quelques mots écrits, une étrange rencontre dans un espace blanc, vide, entre une fille et un garçon. Et un sucre qui chute dans une tasse pleine d’eau chaude, où la jeune fille infuse son sachet de thé. Nous sommes en Hollande, alors que la guerre gronde et que les orientaux sont obligés de porter une étoile à cinq branches dans les rues...
Critique : En partant du Journal d’Anne Frank, Machiko Kyo réalise cette histoire fictive de la jeune Hanako, sa grande sœur et ses deux parents qui vivent en Hollande. Ils sont orientaux, et doivent porter une étoile pour se distinguer du reste de la population. Décision partiale de l’empire de l’Ordre Nouveau qui va petit à petit identifier, arrêter, enfermer et exterminer les orientaux dans des camps de la mort. Hanako et sa famille vivent cachés dans les pièces dissimulées d’une maison pour échapper à l’envahisseur.
On fait vite le pont entre l’Ordre Nouveau et les nazis, les orientaux et les juifs, cette guerre et la seconde Guerre Mondiale. En créant ce parallèle, Machiko Kyo nous donne l’espoir que peut-être les choses se passeront différemment ici.
Hanako se rêve actrice, romancière, se dispute avec sa grande sœur et plaît aux garçons. Elle aurait pu avoir une vie normale, mais il va falloir s’enfermer, disparaître du monde extérieur pour survivre. Heureusement, pour ne pas craquer, Hanako a sa force morale, sa fausse insouciance qui la rend détestable pour certains, mais qui est sa manière de tenir face à l’horreur autour d’elle.
Et surtout, Hanako a son journal. Un journal qui ouvre une porte sur un autre monde, celui de l’écrit, certes, mais aussi un endroit imaginaire où elle se retrouve en compagnie d’un garçon, Taro, dans le grand espace blanc des pages. Aucun des deux ne comprend vraiment ce qu’il fait là, pourquoi ils se retrouvent ensemble, mais Târo ne supporte pas Hanako et ne cesse de s’en prendre à elle. Târo a aussi sa vie de son côté, que l’on découvre petit à petit. Et on comprend assez vite l’impossibilité d’une telle rencontre, quand on réalise qui est potentiellement Târo. Machiko Kyo jongle entre la réalité dure, crue, de ce monde où l’Ordre Nouveau chasse les orientaux jusqu’à leur mort, et cet espace vide, où le rêve, le fantastique entrent en scène. Ce lien étrange entre ces deux personnages, cette violence omniprésente dans ce lieu blanc qui n’est pas une évasion vers un monde meilleur, mais la condensation d’un rapport de force, des frustrations de Taro et Hanako. Qui s’invite dans le journal de l’autre ? Et surtout, comment tout cela se terminera-t-il ? Inutile de dire que les émotions sont au rendez-vous dans ce premier volume : rire, tristesse, étonnement et peur. Peur de savoir comment tout cela va finir. Pour avoir la réponse, il faudra attendre le prochain tome.
- © Machiko Kyo 2012
Machiko Kyo opte graphiquement pour un style à l’encontre du manga traditionnel. Personnage stylisé, dessiné d’un simple trait, comme des coups de crayons légers, des décors représentés simplement, parfois rappelés par quelques repères, le pavé des rues, les portes ou les vitres.
Effectivement, les portes ont leur importance dans l’histoire, chaque chapitre porte le nom d’une porte, c’est un passage caché qui permet à Hanako et sa famille de se protéger, le journal s’ouvre comme une porte. Et toutes ces ouvertures sont explorées par Machiko Kyo. Les transitions entre le monde vide et la réalité passent par le sommeil, un sucre, une page...
La BD est en noir et blanc, ou plutôt, en noir et gris car Machiko Kyo utilise énormément de lavis pour apporter contraste et volume. Parfois, le noir s’impose, comme pour la nuit étoilée, et son emploi permet de trancher vraiment avec le blanc et le gris qui règnent dans le reste du manga. Les premières pages sont en couleur, et l’on voit alors que le journal intime de Hanako a une couverture rouge. Un rouge qui va traverser l’histoire, même sans être visuellement présent, par différents moments forts pour Hanako, liés au sang.
Contrairement à l’encrage, les contours des cases sont plus épais, plus denses, sauf à de rares occasions où le dessin occupe le plein espace de la page. Ces cases aux contours plus marqués retiennent les personnages dans l’histoire, même quand ils basculent dans ce mystérieux espace vide. Comme s’il n’y avait pas moyen d’échapper à ce qui va leur arriver.
Le journal de Hanako T.1 est un manga qui secoue les codes de la narration. Inspiré du journal d’une histoire réelle, il établit un monde proche mais différent du nôtre, et dans ce monde-là, ajoute un espace fantastique, où se rencontrent deux personnes qui ne se croiseront jamais dans la réalité de l’histoire. On repense alors au rideau rouge de David Lynch...
216 pages – 14 €
La chronique vous a plu ? Achetez l'œuvre chez nos partenaires !
Galerie photos
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.